Ali Benflis au Point : «Le pouvoir a adopté des lois qui favorisent la fraude électorale»
Dans un entretien accordé à l’hebdomadaire français Le Point, le président de Talaï El-Houriyet, Ali Benflis, a déclaré que l’Algérie «fait face à une véritable crise de régime dans tous les sens de ce concept, qu’ils soient politiques, constitutionnels ou institutionnels».
A la question de savoir si son parti envisageait de participer aux prochaines élections législatives, il a révélé que la réponse sera connue lors de du comité central du parti qui se réunira le 7 janvier 2017. Même s’il ne se fait pas trop d’illusions sur le déroulement du scrutin. «Aux yeux du régime politique en place, les élections n’ont que trois fonctions : conférer périodiquement une légitimité nominale aux institutions ; accréditer un semblant de normalité (…) et, enfin, entretenir l’illusion de l’existence d’un pluralisme politique. Il n’est un secret pour personne, dira-t-il, que le régime s’assure que les élections remplissent ces trois fonctions au moyen de la tricherie politique. Pour cela, il a fait adopter récemment des lois qui favorisent la fraude électorale, il a créé une instance de surveillance des élections à sa solde et il a, par ailleurs, confié à l’appareil politico-administratif l’intégralité de la préparation et de l’organisation des échéances électorales à venir. Rien, donc, n’a fondamentalement changé», affirme-t-il.
Pour Ali Benflis, face à la revendication d’un changement démocratique, le pouvoir en place «multiplie les refus et s’emploie à gagner du temps». Au sujet du débat sur l’école, l’ex-chef de gouvernement estime qu’entre une école «qui ne serait que la réplique de l’école religieuse» et une école «qui ne serait que la réplique de l’école laïque», il y a place pour une école algérienne «ouverte sur le monde et sur son temps, et solidement enracinée dans les valeurs spirituelles et morales de notre société».
A propos des relations algéro-françaises, Benflis reproche au pouvoir politique algérien de «personnaliser» le fonctionnement de l’ensemble de l’Etat, chose qui, selon lui, «impacte sa politique étrangère». Et d’enchaîner : «Le jour où nous pourrons parler d’une véritable relation d’Etats entre l’Algérie et la France, ce jour-là, un grand pas aura été franchi et nos intérêts communs, qui sont nombreux, seront mieux servis.»
Plus prudent au sujet des relations avec le Maroc, Benflis regrette le blocage actuel et estime que la raison la plus préoccupante demeure l’«absence de tout dialogue» entre les deux pays. «Tout doit commencer par le rétablissement du dialogue entre l’Algérie et le Maroc rompu depuis une quinzaine d’années. Alors, un grand pas sera franchi, et cela nous permettra de nous atteler à la recherche sereine de solutions aux contentieux existants». Avant d’ajouter : «Au-delà de la résolution de la question du Sahara Occidental, l’enjeu déterminant est aussi celui de l’intégration régionale à travers la réouverture du chantier de la construction du Grand Maghreb.»
Enfin, sur le terrorisme international, le président de Talaï El-Houriyet juge que c’est par une coopération internationale à la mesure de l’expansion de ce phénomène qu’il devra être combattu. «Cette coopération internationale, explique-t-il, a déjà fait la preuve de son effectivité et elle doit être constamment renforcée. Bien sûr, le terrorisme ne sera pas battu par des guerres-éclair. Son éradication prendra du temps, il importe donc que la coopération internationale qui s’est organisée, et qui se développe, prenne dûment en ligne de compte ce paramètre fondamental.»
R. Mahmoudi
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