Deux policiers agressés par des citoyens aux Issers
Jeudi dernier, des automobilistes formant un cortège ont agressé deux policiers en manquant d’ôter la vie à l’un d’entre eux, si ce dernier n’avait pas été sauvé par un médecin de passage. Cela s’est passé en plein barrage de la police aux Issers, dans la wilaya de Boumerdès. De nombreux citoyens indignés par la scène de violence ont dénoncé l’incivilité qui discrédite l’autorité de l’Etat. Il est environ quinze heures quand les klaxons, les cris qui fusent à travers les carreaux des voitures et la musique de fête se font entendre à l’approche du barrage filtrant qui jouxte l’ancien commissariat des Issers. Deux policiers, éloignés l’un de l’autre d’une cinquantaine de mètres, organisent la circulation. La tête du cortège dépasse le premier, positionné au carrefour et arrive bruyamment au niveau du second agent de police posté au milieu du barrage. Là, le policier demande aux automobilistes de fermer les portières ouvertes des voitures et aux fêtards sortant dangereusement leur corps des fenêtres de s’asseoir correctement. Rien d’offensant de la part de l’homme de loi qui ne fait que son «boulot» raconte Samir, un jeune homme qui attendait un transport commun à quelques pas.
Malheureusement, les accompagnateurs de la mariée ne sont apparemment pas de cet avis. Ils protestent et chahutent le policier en profitant du nombre et de l’ambiance tonitruante du cortège. L’agent de l’ordre public insiste sur le respect des consignes de sécurité qu’il vient d’exiger et les chauffeurs élèvent la voix lui reprochant de bloquer le convoi joyeux. Excités, voilà que des individus encerclent rapidement le policier, l’empoignent et lui portent des coups. Selon des témoins oculaires, au moins trois personnes auraient frappé le fonctionnaire de police avant que son collègue ne vienne lui porter secours en tentant d’apaiser les esprits.
Saïd, un vieux monsieur qui marchait le long du trottoir arrive en même temps que le deuxième policier au niveau du barrage. «Le deuxième policier a réussi à calmer les agresseurs en libérant le cortège. Il a demandé au chauffeur de l’un des véhicules de rester garé pour prendre les coordonnées. J’écoutais l’échange de propos. Il a signifié au chauffeur du fourgon qu’il fallait que les agresseurs s’expliquent à leur retour du cortège. C’est à ce moment-là que le véhicule a démarré en trombe, accrochant le policier par son rétroviseur et le traînant sur plusieurs mètres. J’étais effrayé. Le corps du policier a roulé par terre et s’est immobilisé. J’ai cru qu’il était mort. Une voiture s’est arrêtée en sens inverse et un médecin en est descendu. Je l’ai vu accomplir des gestes d’urgence et le policier a été emmené inconscient à l’hôpital.»
Renseignements pris, on apprend que les deux policiers ont tous deux plus de vingt jours d’incapacité totale de travail. Des arrêts-maladies relatifs à leurs blessures mais ne rendant certainement pas compte de la gravité du préjudice moral. Selon des indiscrétions, c’est toute l’équipe de la Sûreté urbaine qui est en état de choc. Un tel déferlement de violence sans aucune raison. «On s’est battus pendant des années contre les bavures policières, aujourd’hui on assiste impuissants à des bavures citoyennes. C’est scandaleux, et cela risque de remettre en question la communion de la police républicaine et des citoyens qui ont combattu ensemble, aux côtés des autres corps de sécurité, le terrorisme», nous déclare un élu municipal.
Quelques jours après l’agression, les coupables sont toujours en liberté malgré leur audition au commissariat. Point d’arrestation, ni de mandat de dépôt. La police accuse le coup avec dignité et sagesse en respectant le nouveau code de procédure pénale. Il faudra attendre l’audience devant le juge pour que les auteurs de cette brutalité imbécile répondent de leurs actes. Ils encourent une peine de cinq ans de prison pour avoir transformé leur fête en un cauchemar pour deux policiers.
Maya Loucif
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