La démission précoce de François Hollande traduit un profond malaise en France
Au-delà de son caractère inédit, la décision du président français François Hollande de renoncer à briguer un second mandat était prévisible. Il aurait été difficile pour lui de s’engager dans l’âpre bataille de la présidentielle alors qu’il est, depuis la fin 2013, le chef de l’Etat en exercice en France le plus impopulaire depuis le début de la Ve République. Pire que son prédécesseur et vieil ennemi Nicolas Sarkozy qu’il a pourtant battu en 2012. Aujourd’hui, François Hollande n’est pas qu’impopulaire auprès de la majorité des Français ; il se trouve même qu’il ne fait plus consensus au sein de sa propre famille politique, la gauche. C’est d’ailleurs, a-t-il dit, pour sauvegarder la cohésion de cette même famille politique qu’il a renoncé à s’engager à nouveau dans l’arène. Son retrait de la course à la présidentielle de 2017 ne règle cependant pas le problème du Parti socialiste.
C’est qu’en quittant l’Elysée l’ancien sherpa de François Mitterrand laisse derrière lui un bilan des plus catastrophiques. Un bilan que le futur vainqueur de la primaire de gauche aura à traîner comme un boulet. François Hollande n’a pratiquement honoré aucune de ses nombreuses promesses lancées à la face des Français à la veille de son élection il y a quatre ans et demi. Au contraire, la France s’est davantage enfoncée dans la crise et dans les scandales à répétition sous son règne.
Scandales et crises sociales
Sur le plan économique, la situation de la France ne s’est pas renversée. L’inversion de la courbe du chômage dont il avait pourtant fait son principal cheval de bataille n’a pas eu lieu non plus. En revanche, la «normalité» du président a viré à la gêne quand il est surpris en train de sortir du domicile de sa maîtresse en janvier 2014, ou lorsque ses révélations aux journalistes sont publiées en octobre 2016 dans Un président ne devrait pas dire ça… Il n’en fallait pas plus pour qu’il devienne la risée de la classe politique française.
L’histoire retiendra aussi que c’est François Hollande, un président de gauche, qui a défendu bec et ongles l’inique projet de la loi sur la déchéance de nationalité et que c’est encore lui l’inspirateur du projet de la loi Travail, adoptée à l’Assemblée au moyen de l’article 49-3, à l’origine d’importantes contestations sociales. La droite n’aurait sans doute pas fait mieux.
Ce sont d’ailleurs ces même choix qui ont fini par diviser le Parti socialiste. Ne voulant, et ne pouvant, assumer de telles «dérives», Arnaud Montebourg, Benoît Hamon, Aurélie Filippetti, Cécile Duflot ou Christiane Taubira n’ont pas hésité une seule seconde à le quitter et à devenir même ses plus farouches adversaires, surtout que toutes ces déconvenues ont fait le jeu du Front national, en particulier, et de la droite, en général, dont les rangs n’ont cessé de grossir ces dernières années.
Choix catastrophiques
François Hollande, qui laissera en 2017 une France gagnée par un profond malaise, n’a pas échoué qu’en politique intérieure. Ses choix en politique extérieure se sont aussi soldés par des échecs cuisants. Partout où la France a eu à intervenir durant son mandat – ce qui constitue une erreur en soi –, elle n’a fait qu’aggraver les crises au lieu de les régler. C’est le cas du Sahel où les terroristes redoublent de férocité ces derniers jours, de la Libye en proie à une guerre civile sans fin ou encore de la Syrie où l’armée syrienne est en train de laminer les groupes armés protégés par Paris. Dans ce dernier pays, les Français s’y sont tout simplement fait évincer car incapables de peser sur le cours des événements, tandis que de nouvelles puissances, comme la Russie, ont émergé.
Comme en politique il n’y pas d’action sans réaction, la société française a payé au prix lourd les interventions à l’étranger de son gouvernement. Sans doute jamais la France n’a autant été frappée par le terrorisme que comme ces deux dernières années, sous le règne chaotique de François Hollande.
Comme l’affirme François Fillon, candidat de la droite à la présidentielle de mai 2017, le quinquennat de François Hollande «s’achève dans la pagaille politique et la déliquescence du pouvoir». «Ce soir, a-t-il dit, le président de la République admet que son échec patent lui interdit d’aller plus loin».
Il est vrai qu’avec un tel bilan il aurait été autant ridicule que suicidaire pour lui de chercher à rempiler.
Khider Cherif
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