Violations commises par l’armée française : les Tunisiens demandent réparation
La présidente de l’Instance Vérité et Dignité (IVD), la journaliste et militante des droits de l’Homme Sihem Bensedrine, a appelé avec véhémence l’Etat tunisien à demander réparation à la France pour les violations commises par l’armée française lors de la bataille de Bizerte. La bataille de Bizerte avait, rappelle-t-on, opposé du 19 au 23 juillet 1961 la Tunisie alors indépendante et la France. Les raisons du conflit sont connues aujourd’hui de tous : la France avait refusé de rétrocéder à la Tunisie la base militaire de Bizerte qu’elle continuait à contrôler. Les autorités tunisiennes de l’époque avaient donc décidé de la reprendre de force. Lors de son audition à l’Assemblée des représentants du peuple, en marge de l’adoption du budget de l’Instance Vérité et Dignité, Mme Bensedrine a affirmé détenir des documents impliquant la France dans les exactions commises lors de la bataille de Bizerte. «Nous sommes tombés sur des documents français qui nous donnent plus de preuves quant aux violations des Accords de Genève», a-t-elle indiqué aux membres du Parlement tunisien.
Sihem Bensedrine, dont l’institution est chargée de déterminer les responsabilités en matière de violations des droits de l’Homme entre 1955 et 2013, a fait savoir, en outre, qu’un dossier était en cours d’élaboration. «Ils ont bombardé des civils et commis des crimes de guerre, et cela est décrit. Nous sommes en train de préparer (un dossier) et quand il sera terminé, l’Etat français devra s’expliquer», a-t-elle soutenu. «La Tunisie demandera son droit, et je dis la Tunisie et pas l’Instance, car l’Instance prépare les dossiers et les transmet aux parties concernées, et celles-ci feront, on l’espère, leur travail, à savoir demander à la France pas seulement des excuses mais aussi réparation pour ces violations en Tunisie, un pays indépendant et souverain», a martelé encore l’ancienne journaliste.
Très relayé par la presse française et internationale de l’époque dans le contexte de la guerre d’Algérie qui se poursuit et de la guerre froide, le conflit franco-tunisien est presque tombé dans l’oubli au XXIe siècle. Selon un rapport du Croissant-Rouge tunisien, les trois jours d’hostilité ont causé plus de 5 000 morts. Pour l’historien tunisien Mohamed Lazhar Gharbi, le chiffre le plus vraisemblable est de 4 000 morts. Cependant, le communiqué officiel tunisien fait état d’un total de 630 morts et 1 555 blessés.
Khider Cherif
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