Dossier – les partis et les législatives : le FFS en quête d’une vocation nationale (IV)
De tous les partis d’opposition engagés dans le processus électoral actuel, le Front des forces socialistes est celui qui, curieusement, affiche le plus d’enthousiasme et la plus grande détermination. Un état d’esprit qui tranche avec l’ambiance préélectorale actuelle dominée par des mises en garde de la plupart des partis, accusant le pouvoir d’avoir d’ores et déjà lancé son plan de fraude et de caporalisation des prochaines élections. Est-ce le signe d’un optimisme nourri par des prévisions internes ou des garanties que ce parti aurait reçues ou n’est-ce qu’une affaire interne au parti ? La persistance du FFS à prendre part aux législatives, est-elle, en effet, l’unique moyen pour la direction de neutraliser les partisans du boycott qui soutiendraient notamment Rachid Halet, ancien membre de l’instance présidentielle exclu il y a quelques semaines, et qui refusent de cautionner une «énième mascarade électorale» ?
Cette célérité avec laquelle le parti avait annoncé sa participation conforte dans leur thèse ceux qui estiment que le FFS, à l’instar d’ailleurs des autres formations, aurait lui aussi «négocié son quota» dans la future Assemblée. Une situation psychologique qui serait certainement dure à vivre pour un parti qui s’est toujours présenté comme le porte-étendard de l’opposition démocratique en Algérie.
Première épreuve depuis la disparition de son leader historique, Hocine Aït Ahmed, les prochaines législatives s’annoncent, en effet, capitales pour l’avenir de ce parti qui a tout misé sur son projet de «reconstruction d’un consensus national», qui a pourtant si peu d’échos dans la classe politique, y compris parmi ses anciens alliés islamistes ou dits «réconciliateurs». Or, son objectif le plus immédiat, à travers les élections d’avril 2017, est d’accéder enfin à une vocation nationale, en ayant des élus ailleurs qu’en Kabylie. D’où l’intensification, depuis quelques mois, des activités et meetings dans certaines régions du Centre et de l’Est du pays, où le FFS se voit en mesure de s’implanter et de capter des voix.
C’est certainement aussi dans cette optique que la direction a décidé, lors de son dernier conseil national, tenu le week-end dernier, de maintenir Abdelmalek Bouchafa, un militant originaire de Constantine, au poste de premier secrétaire, alors que son mandat arrivait à terme. Il faut dire que le FFS a plusieurs fois tenté des percées en dehors de son fief traditionnel, mais l’unique fois où il a eu un député dans la wilaya de Bordj Bou-Arreridj, aux élections de mai 2012, des militants y ont vu «une fraude» en faveur de leur parti. Cette quête d’une vocation nationale se manifeste aussi dans les discours du parti condamnant avec vigueur l’idéologie autonomiste et séparatiste.
Il y a aussi, au sein de l’actuelle direction, le souci de radicaliser le discours à l’approche du scrutin et d’enrayer, par-là, cette réputation de parti proche des «cercles de décideurs» (dixit Rachid Halet) qui est toujours lourde à porter. On a vu, dans le dernier meeting animé à la salle Atlas, à Alger, comment le premier secrétaire a enflammé la salle en s’attaquant violemment aux institutions et en qualifiant la majorité actuelle de «truquée», au point de pousser le secrétaire général du FLN, Djamel Ould-Abbès, à quitter précipitamment la salle, en signe de désapprobation.
De même, au niveau de l’APN, le groupe parlementaire du FFS multiplie les déclarations dénonçant systématiquement tous les projets de loi soumis au débat au sein de cette institution. Ce qui n’empêche pas ses représentants au niveau notamment des APW, où le FFS détient la majorité, de soutenir l’exécutif avec, parfois, un certain zèle.
Enfin, le FFS aura à faire face à deux obstacles dans cette course : une tendance à l’abstention prévisible en Kabylie, son bastion, et la présence d’un concurrent sérieux, le RCD, qui revient en force sur la scène politique locale.
R. Mahmoudi
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