Les partis et les législatives : le RCD entre renouveau et atavismes identitaires (V)
Campagnes d’adhésion et de réadhésion, assemblées générales, conférences : l’approche des élections a sonné la mobilisation générale des structures du RCD. L’impression que donne cette activité organique intense est que le parti de Mohcine Belabbas fait sa mue, se rénove, à travers notamment l’aile jeunesse et l’aile femmes qui se structurent, non seulement dans les régions de Kabylie mais aussi à travers plusieurs wilayas du pays, comme le montrent les comptes rendus quotidiens. Pour un parti qui a, d’abord, survécu au départ précipité de son chef historique et subi une multitude de crises internes, dont la plus récente a été l’exclusion de Nordine Aït Hamouda, le pari n’est pas loin d’être gagné. Ce qui manque néanmoins à ce rebond, c’est un discours politique porteur et clair.
En dehors d’une critique mécanique du pouvoir, la position du RCD par rapport à certaines questions comme l’islamisme, la régionlisation ou le changement déroute parfois. Ainsi, la direction du parti ne s’est jamais expliquée sérieusement sur la célérité avec laquelle elle avait annoncé sa participation aux élections, alors que le RCD était à la pointe des partisans d’une transition au sein de la CNLTD, que lui et d’autres partis ont accepté de sacrifier.
«La participation du RCD aux prochaines élections découle d’une décision souveraine de son instance qu’est le conseil national», a déclaré le porte-parole, Atmane Mazouz, dans une récente déclaration. «S’agissant des garanties que le pouvoir nous fait miroiter, le RCD ne croit en aucune d’elles. Pour l’opinion publique, la position du RCD est connue depuis longtemps : pour mettre fin à la fraude électorale, il faut confier tout le processus de l’organisation des élections à une instance indépendante et permanente ; l’administration ne doit avoir qu’un rôle logistique pour pourvoir cette entité en moyens», clame-t-il.
Il faut rappeler que la mise en place d’une instance d’organisation – et pas seulement de la surveillance – des élections a été un des préalables posés par le RCD et ses partenaires de l’opposition pour s’engager dans la course électorale. Mais avait-il d’autres choix face à l’intransigeance et l’obstination du pouvoir et, surtout, avec la participation de son rival traditionnel, le FFS, qui, lui, mise le tout pour tout dans les prochaines législatives ? Le jeu institutionnel s’est avéré être, en effet, une fatalité pour la majorité des partis.
Autre point ambigu dans le discours du RCD : la régionalisation. Si dans son programme, ce parti promeut un «Etat unitaire régionalisé», une innovante version du fédéralisme, on décèle parfois des affinités, dans certains discours, avec le mouvement autonomiste de Ferhat Mehenni qui, lui, réclame clairement la séparation de la Kabylie du reste du pays. Un rapprochement tactique en vue des prochaines élections ou une radicalisation subséquente au parcours historique de ce parti ?
Né dans la déchirure du mouvement berbère, le RCD était, jusqu’à l’avènement du MAK, la seule formation politique à célébrer l’anniversaire du 20 Avril par des marches et avait, donc, le monopole quasi absolu de la revendication identitaire. Il s’agit pour le RCD d’éviter, à la fois, qu’une partie de sa base – la plus sensible au discours identitaire – aille dans cette mouvance radicale et de tenter de récupérer un important gisement électoral. Les législatives d’avril 2017 serviront justement de test pour ce parti et pour l’ensemble de la mouvance démocratique dans le pays.
R. Mahmoudi
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