L’équation libyenne
Par Khider Cherif – L’interview accordée mardi par le maréchal Khalifa Haftar, commandant en chef de l’Armée nationale libyenne (ANL), au quotidien italien Il Corriere della sera confirme une nouvelle fois que la Russie s’emploie activement depuis des semaines à reprendre pied au Maghreb. Evincée de la région par l’Otan au lendemain de la chute de Mouammar Kadhafi, Moscou mise très clairement aujourd’hui sur lui pour réaliser son objectif.
En quête de soutiens, l’ancien officier de Mouammar Kadhafi ne demandait certainement pas mieux, surtout que le président Poutine lui a promis de l’aider à obtenir la levée de l’embargo sur les armes qui frappe son pays depuis 2011. En fait, les propos tenus par Khalifa Haftar dans Il Corriere della sera ne font que corroborer la récente déclaration du vice-ministre russe des Affaires étrangères, Gennady Gatilov, qui recommande grosso modo aux Libyens d’accorder à Khalifa Haftar une place de choix sur l’échiquier politique et sécuritaire libyen.
Depuis la sortie médiatique de Gennady Gatilov, Khalifa Haftar se sent évidemment davantage plus fort. Il estime même être désormais en position de force vis-à-vis de Tripoli. C’est normal. Bénéficier à la fois du parapluie égyptien et russe, ce n’est pas rien. Cela peut même s’avérer décisif dans sa lutte pour la conquête du pouvoir. Car prendre le pouvoir par la force, il s’en croit aujourd’hui capable. Il le dit d’ailleurs.
N’ayant jamais caché son aversion pour les longs palabres stériles, Khalifa Haftar ne croit foncièrement qu’au langage de la force, surtout lorsqu’il y a en face des islamistes, Daech et des terroristes repentis. Fort donc du soutien russe, égyptien et émirati, l’«homme providentiel» du Parlement de Tobrouk apparaît aujourd’hui plus que tenté de quitter la table des négociations et de fermer durablement la porte au nez à Faïz Al-Sarraj, le Premier ministre du Gouvernement d’union nationale. Il semble même y être poussé.
Il est à espérer tout de même que le maréchal Haftar ne cédera pas au chant des sirènes, car dans les villes de l’Ouest libyen, il n’y a pas que des terroristes, comme beaucoup tendent à le faire croire. Ou à le lui faire croire. Il y a des Libyens comme lui. Cela à la différence qu’ils ne portent pas les mêmes espoirs que lui.
K. C.
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