Emeutes gênantes
Par Houari Achouri – Les émeutes qui ont éclaté depuis plusieurs jours dans la banlieue parisienne risquent de dégénérer et l’embrasement pourrait s’étendre à d’autres villes de France. A l’origine de la flambée de violences à Aulnay-sous-Bois, Bobigny, Argenteuil, Clichy-sous-Bois, Nanterre, Drancy, Mantes-la-Jolie, Les Ulis…, il y a eu ce violent contrôle d’identité effectué par quatre policiers, le 2 février dernier, à Aulnay-sous-Bois, au cours duquel un jeune banlieusard de 22 ans, Théo, a été blessé. Depuis, les heurts se multiplient entre les jeunes et la police. Les médias dominants assurent une couverture minimum de ces événements «sur instruction venant d’en-haut» apparemment.
A quelque deux mois de l’élection présidentielle en France, dans un contexte de scandales à répétition touchant les candidats, la classe politique française veut éviter le problème de fond posé par la situation de ghetto dans laquelle ont été placées les «banlieues» en France. Car, en fait, ce sont les pratiques discriminatoires, voire racistes de la police qui sont révélées dans l’affaire Théo. Ce jeune a été victime de viol avec une matraque, de crachat et d’insultes racistes de la part des policiers qui l’auraient traité de «negro», de «bamboula» et de «salope». Face à ces faits, la candidate du Front national, Marine Le Pen, appelle à plus de répression contre les banlieusards, c’est-à-dire à «plus de Théo», et les autres dirigeants politiques demandent carrément aux médias et aux politiques de mettre la chape de plomb du silence sur ces événements.
Les médias qui en parlent sont contraints de reprendre le concentré habituel qui résume les émeutes en chiffres : le nombre de véhicules incendiés par les émeutiers et le nombre de personnes interpellées par la police. La manœuvre est grossière, il s’agit de monter en épingle les actes de voyous – incendies de véhicules et saccages d’établissements privés et publics – et faire oublier le comportement de la police. Dans le pays des droits de l’Homme et de l’Etat de droit, comme se veut la France, il est évident que, pour le pouvoir, ce comportement de la police ne doit pas dominer l’actualité en période électorale.
Ce n’est pas la première fois qu’une telle fracture surgit dans la société française, à travers les affrontements entre les forces de l’ordre et les jeunes de banlieues qui sont décrites systématiquement comme quartiers difficiles. Des émeutes ont éclaté en octobre 2005 à la suite de la mort de deux adolescents dans un poste électrique où ils s’étaient réfugiés pour échapper aux policiers. Il y a quelques mois, un jeune de 24 ans, Adama Traoré, est mort à la suite de son interpellation par la police, à Beaumont-sur-Oise. Ce sont les frères de la victime qui ont été poursuivis en justice pour… violences contre les policiers.
Au lieu de chercher de vraies solutions aux difficultés vécues par les populations dans les banlieues marginalisées, c’est la solution sécuritaire qui est privilégiée par le gouvernement français, un nouveau projet de loi devrait permettre aux policiers d’utiliser leurs armes en dehors du service «en cas de légitime défense».
H. A.
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