Attaqué pour avoir dit la vérité sur la colonisation : Emmanuel Macron riposte
Au lendemain de son interview à une chaîne de télévision algérienne, dans laquelle il a qualifié la colonisation de l’Algérie par la France de «crime contre l’humanité», le candidat à la présidentielle française et ancien ministre de l’Economie Emmanuel Macron a répliqué à ses détracteurs qui ont jugé sa déclaration de «honteuse» (Gérald Darmanin, député LR) ou d’indigne d’un candidat à la présidence de la République (François Fillon, candidat), mais tout en nuançant ses propos.
A travers une série de tweets, le candidat d’«En Marche !» récuse les accusations de ses adversaires et leur demande d’arrêter leurs invectives. «Stop aux divisions sur ces sujets. Je ne suis ni dans la culpabilisation ni dans la dramatisation», a-t-il écrit dans son message posté mercredi. Et d’enchaîner : «La France a importé la Déclaration des droits de l’Homme en Algérie mais elle a oublié de la lire.» Une périphrase qu’il a déjà utilisée dans son interview. Pour faire dans l’équilibre, il balancera deux minutes plus tard : «Je suis le premier responsable politique français à avoir parlé en Algérie à la fois des pieds-noirs, des harkis et de tous les Algériens.» Un message qui s’adresse à tous ceux que sa petite phrase a choqués dans le camp adverse. Avant de conclure par une moralité dont il pourrait tirer un slogan de campagne : «60 ans après, il est temps de réconcilier nos mémoires. C’est la responsabilité de ma génération qui n’a pas vécu la guerre.»
Pour rappel, Emmanuel Macron a estimé à Alger, lors d’une interview télévisée mardi, que la colonisation était «un crime contre l’humanité» et «une vraie barbarie», en ajoutant que cela «fait partie de ce passé que nous devons regarder en face en présentant aussi nos excuses à l’égard de celles et ceux vers lesquels nous avons commis ces gestes». Avant de relativiser sa conception, en disant : «En même temps, il ne faut pas balayer tout ce passé, et je ne regrette pas cela parce qu’il y a une jolie formule qui vaut pour l’Algérie : la France a installé les droits de l’Homme en Algérie, simplement elle a oublié de les lire.»
La presse parisienne s’est largement fait écho de cette déclaration, en tentant de l’inscrire dans le cadre de la campagne électorale qui bat son plein en France. Ce n’est pas la première fois, dirions-nous, que le lourd héritage de la colonisation de l’Algérie, avec son lot de défiances, de provocations et de controverses, s’invite dans le débat politique franco-français jusqu’à devenir une ligne de démarcation politique majeure.
Pour certains titres comme Le Figaro, cette sortie de Macron est une manière pour lui de se distinguer de ses deux principaux concurrents, à savoir Marine Le Pen et François Fillon, qui ont des positions tranchées sur la colonisation. L’hebdomadaire Le Point relève un virage «à 180 degrés», en se référant à une déclaration que le candidat avait tenue en novembre dernier sur ce sujet : «Oui, en Algérie, avait dit Macron, il y a eu la torture mais aussi l’émergence d’un Etat, de richesses, de classes moyennes, c’est la réalité de la colonisation. Il y a eu des éléments de civilisation et des éléments de barbarie.» Une phrase qui lui avait valu de nombreuses critiques dans la classe politique française.
R. Mahmoudi
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