Hamon rejoint Macron sur la colonisation : les jeunes bousculent la vieille garde
La petite phrase d’Emmanuel Macron sur la colonisation continue à faire des vagues en France et révèle l’ampleur du fossé entre la vieille garde, attachée à ses dogmes colonialistes et qu’on retrouve dans tous les partis, et une nouvelle génération de politiciens qui cherche à s’en affranchir et semble plus décomplexée par rapport à ce thème de la colonisation. C’est ce que vient d’illustrer le candidat du PS Benoît Hamon (49 ans) qui, en réaction à la polémique suscitée par son rival, a dit réfléchir à la forme que prendraient ses «regrets» s’il est élu à la présidence de la République.
Invité du «Grand Jury» RTL/Le Figaro/LCI dimanche, le candidat socialiste, tout en refusant d’utiliser l’expression de «crimes contre l’humanité», n’en a pas moins dénoncé la période coloniale en des termes on ne peut plus clairs. Plus averti, Hamon explique son refus de juger la présence coloniale française dans des pays anciennement colonisés par sa crainte de devoir, demain s’il est élu président, envisager qu’une Cour pénale internationale puisse juger des Français pour crimes contre l’humanité. Or, on sait qu’il existe une loi en France amnistiant tous les faits de guerre commis par l’armée coloniale durant la période correspondant à «la guerre d’Algérie» (1954-1962). Une chose à laquelle Emmanuel Macron n’aurait pas pensé au moment où il a tenu ses propos à Alger, et qu’il a ensuite tenté de rectifier, en reformulant sa phrase en disant : «Crimes contre l’humain» au lieu de «crimes contre l’humanité».
Cela dit, Macron et Hamon se rejoignent sur cette idée, essentielle et fondatrice, de dénonciation de la colonisation, qui peut ouvrir la voie, à l’avenir, à d’autres démarches susceptibles de provoquer la rupture avec le discours dominant, reproduit par plusieurs générations de politiques nourris au mythe du colonialisme. Idée qui peut aussi permettre un nouveau départ des relations entre la France et l’Algérie, bloquées ou perturbées en partie à cause de cette obstination des dirigeants français, de gauche comme de droite, à refuser de revoir leur perception du passé colonial de leur pays, restée figée depuis des décennies.
Il est fort à parier que cette preuve d’audace chez Macron et Hamon va encore motiver d’autres jeunes leaders politiques pour essayer d’avancer sur une voie de realpolitik qui a, jusque-là, fait défaut au système politique français, à un moment où même au sein des vieux apparatchiks du PS, des voix s’élèvent – à l’image de Bernard Kouchner – pour donner raison à Emmanuel Macron, de 38 ans son aîné.
R. Mahmoudi
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