Erdogan fait arrêter un journaliste pour avoir révélé les liens de son gendre avec Daech
Un journaliste turco-allemand est depuis mardi dernier incarcéré en Turquie pour «propagande terroriste». Le président Recep Tayyip Erdogan en a fait toute une histoire, en voulant lui donner une dimension hautement politique pour déclarer la guerre à Berlin où il est indésirable, depuis l’annonce jeudi de l’annulation par les autorités locales de deux meetings dans le cadre de sa campagne pour le prochain référendum. Face à la presse, le sultan néo-ottoman a présenté vendredi ce correspondant comme «représentant du PKK» et comme un «agent allemand». Selon lui, avant son arrestation, le journaliste s’était «caché pendant un mois au consulat allemand» à Istanbul. Erdogan a omis de rappeler dans son réquisitoire que le journaliste en question avait été interpellé le 14 février après qu’il eut écrit dans un échange de courriels qu’un collectif de hackers avait obtenu le compte de messagerie privé de Berat Albayrak, ministre de l’Energie turc et gendre du président Erdogan.
En décembre 2016, la presse avait fait état d’une série de mails de l’indélicat gendre du président turc révélant ses accointances – et par ricochet celle de son gouvernement – avec l’organisation terroriste Daech dans l’affaire d’importation de pétrole en provenance des régions sous contrôle de l’organisation terroriste, par l’intermédiaire de la compagnie Powertrans, laquelle compagnie avait bénéficié d’une dérogation à l’embargo imposé à toutes les autres sociétés pétrolières concernant les importations comme les exportations de pétrole en Turquie.
Ces révélations ont mis à la lumière les liens inavoués entre Ankara et Daech, à un moment où Recep Tayyip Erdogan intensifiait son ingérence en Syrie, et même en Irak, et son armée encadrait des centaines de djihadistes qui traversaient la frontière turque pour se rendre sur le front. Le gouvernement turc avait beau se défendre de toute liaison avec Daech et les autres groupes armés mais des photographies montrant l’acheminement du pétrole vers la Turquie dans le cadre d’une vaste contrebande assurée par l’armée turque ont achevé de mettre à nu le régime d’Erdogan et de le discréditer aux yeux de l’opinion internationale.
Or, tout le monde savait que le financement de Daech vient essentiellement de ses recettes pétrolières colossales qu’il engrangeait grâce à la vente clandestine mais organisée de cette matière première stratégique, à l’époque où le prix du Brent était à son apogée. D’ailleurs, une des priorités de la coalition internationale, conduite par les Etats-Unis, dans sa guerre contre Daech était de bombarder les raffineries de pétrole détenues par Daech à Mossoul et au nord de la Syrie.
R. Mahmoudi
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