Liaison entre la DGED marocaine et les assassins des diplomates algériens à Gao
Le très médiatisé groupe mauritanien Sahara Media, connu pour donner des «scoops» sur les opérations des groupes terroristes qui pullulent au Sahel, n’est en réalité qu’un des nombreux sous-traitants médiatiques des services spéciaux marocains parmi lesquels la Direction générale des études et de la documentation (DGED). Son directeur, Abdallah Ould Mohamdy, entretient des relations très proches avec les différents responsables qui se sont succédé à la tête des services secrets marocains. Le hacker marocain Chris Coleman, qui avait déjà fait état en 2014 des relations privilégiées qui existent entre le groupe Sahara Media et la DGED, a apporté cette semaine la preuve que cette relation a beaucoup évolué depuis. Du statut de directeur de journal, Abdallah Ould Mohamdy a évolué dans la hiérarchie des services d’espionnage marocains et est devenu un agent opérationnel.
Un des emails échangés entre Abdallah Mohamdy et Ouali Tagma, le Monsieur Afrique des Affaires étrangères marocaines, intercepté récemment par le hacker marocain, montre que Sahara Media fournit également le soutien logistique nécessaire aux éléments de la DGED en opération dans la région. Dans le mail en question, Abdallah Ould Mohamdy informe ainsi son officier traitant de l’exfiltration réussie au Maroc de Seyid Oule Mohamedou, un citoyen mauritanien que de nombreuses sources présentent tantôt comme un trafiquant et tantôt comme un terroriste. Au Sahel, la frontière entre les deux est de toutes les manières ténue et souvent inexistante.
Le hacker mentionne que le mail intercepté contient un scanne de la carte d’identité de Seyid Oule Mohamedou et une copie d’une déclaration d’admission temporaire de moyens de transport délivrée par l’administration marocaine des Douanes et Impôts indirects. Selon le document en question, Seyid Oule Mohamedou est entré au Maroc en voiture en date du 4 avril 2014. L’email d’Abdallah Mohamdy a été envoyé vingt-cinq jours après.
Seyid Oule Mohamedou émarge-t-il également à la DGED ou s’apprête-il à le faire ? Chris Coleman ne le dit pas. Mais rien n’est exclu. La boîte mail de Tagma prouve en tous les cas (encore une fois devrions-nous dire) les connexions nettes entre Sahara Media, le terrorisme régional et les services marocains. Seyid Oule Mohamedou pourrait bien appartenir au Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao), groupe créé par les services secrets marocains pour déstabiliser le Front Polisario et l’Algérie à partir du Mali. Le groupe terroriste avait, rappelle-t-on, signé son acte de naissance avec l’attaque, en octobre 2011, de la maison d’accueil de Rabouni où logent les coopérants étrangers chargés de suivre les programmes d’aide aux camps des réfugiés sahraouis.
Le Mujao s’est distingué des autres organisations terroristes activant sur le territoire malien par son acharnement contre l’Algérie dont il fera sa cible principale. Son nom indique l’Afrique de l’Ouest mais son GPS est coincé sur le Nord, et plus précisément sur l’Algérie. Les attentats (Tindouf le 23 octobre 2011, Tamanrasset le 3 mars 2012, Ouargla le 29 juin 2012 et surtout le kidnapping de sept diplomates algériens à Gao, en avril 2012), les sorties et attaques médiatiques visant l’Algérie et le Polisario ne laissent aucun doute sur l’implication des services secrets marocains dans les activités du Mujao.
Comme par hasard, le fondateur de ce mouvement, Hammada Ould Mohamed Kheirou, est originaire de la Mauritanie, pays qui procédera le 21 décembre 2011, un mois après l’attaque contre Rabouni, à l’expulsion de Abdelhafid El-Bakkali, officier de la DGED marocaine agissant sous couverture (correspondant de la MAP). La décision mauritanienne était perçue à l’époque par de nombreux observateurs comme un message de fermeté face aux agissements devenus embarrassants des éléments de la DGED marocaine.
Khider Cherif