Benflis : «Le colonialisme n’a pas été un bien mais un mal absolu»
De Jijel, le président de Talaie El-Houriyet, Ali Benflis, a répondu à ceux qui pensent encore en France que la colonisation a été «civilisatrice». Cet ancien chef de gouvernement et fils de chahid a déclaré devant un parterre de militants que «le colonialisme n’a pas été un bien, il a été le mal absolu».
«Le colonialisme n’a pas été lumière mais obscurantisme ; le colonialisme n’a pas été un progrès mais une régression ; le colonialisme n’a pas été une mission de civilisation mais une œuvre de barbarie», a-t-il enchaîné, dénonçant ainsi les nostalgiques de l’Algérie française. Le président de Talaie El-Houriyet, qui milite pour un changement de système politique en Algérie, a souligné que «cinquante-cinq ans après l’indépendance de l’Algérie, dans certains milieux français, la mentalité coloniale est toujours là ; l’esprit colonial est toujours là ; les obsessions coloniales sont toujours là». «Le système n’admet pas sa défaite ; il n’accepte pas son démantèlement ; il ne veut pas reconnaître que l’Histoire lui a donné tort et qu’elle l’a condamné de manière irrécusable», a-t-il poursuivi, rappelant les sacrifices des Algériens dont des héros de la Révolution tels que Didouche Mourad, Zighout Youcef, Lakhdar Bentobal, Ali Kafi et Salah Boubnider.
Pour Ali Benflis, la repentance est une exigence morale et civilisationnelle. «En Algérie, le colonialisme a pris toutes les formes d’un crime d’agression, d’un crime de génocide et d’un crime contre l’humanité», a-t-il soutenu. «Nous faillirions au serment fait à Didouche Mourad et aux chouhada de la nation si nous laissions dire ou écrire que nos héros se sont opposés au progrès que de généreux bienfaiteurs seraient venus leur apporter alors qu’ils ont combattu une occupation, une oppression et un asservissement. Nous faillirions au serment fait à Didouche Mourad et aux chouhada de la nation si nous laissions dire ou écrire qu’ils n’ont pas combattu une ignoble prétention à la supériorité raciale ravalant le peuple algérien tout entier au rang d’une sous-humanité à travers le code de l’indigénat abject et odieux», s’est demandé Ali Benflis qui estime qu’il ne faut pas que les Algériens laissent dire ou écrire que la colonisation a été un enrichissement pour notre pays et non pas une spoliation et une prédation, une spoliation de nos terres et une prédation de nos ressources et de nos richesses.
«Il n’y a rien, absolument rien à glorifier dans le système colonial. Il n’y a que des torts à redresser ; il n’y a que des méfaits pour lesquels il faut savoir exprimer des regrets. Il n’y a que des blessures profondes et des souffrances indicibles, injustement infligées à notre peuple et pour lesquelles il faut savoir présenter des excuses», a-t-il martelé, rappelant les actes de repentance effectués par d’autres nations.
«De grandes nations coloniales ont compris cette exigence et entrepris leur examen de conscience. En 1947, déjà, la Hollande présentait ses excuses à l’Indonésie. En 2004, l’Allemagne a présenté ses excuses à la Namibie. En 2008, l’Italie a présenté ses excuses à la Libye. En 2008, aussi, l’Australie a présenté ses excuses aux populations natives de ce territoire. En 2013, la Grande Bretagne a présenté ses excuses au Kenya», a-t-il indiqué. «Pourquoi donc l’ordre colonial français ferait-il exception dans cette tendance mondiale ? Pourquoi l’ordre colonial français s’exonérait-il de ses méfaits et de ses crimes ? Et pourquoi l’ordre colonial français resterait-il le seul à continuer à s’enorgueillir d’une tentative de destruction totale d’un peuple et d’une nation ?» s’est interrogé Benflis pour qui «le devoir de mémoire envers nos glorieux chouhada et nos vaillants moudjahidine ne nous quittera pas».
Le président de Talaie El-Houriyet regrette cependant que l’Algérie ne soit pas encore un pays de développement et démocratique. Il regrette encore que l’Etat algérien ne soit pas solide, puissant et respecté parmi les autres Etats du monde. Il relève que l’Algérie dépend sur le plan économique presque totalement de l’étranger pour la satisfaction de ses besoins. Pour lui, il y a une solution, une voie de salut, c’est le changement politique.
Sonia Baker
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