Pour le report des élections et un vrai dialogue
Par Samir Bouakouir – Chute des revenus, limitation drastique des importations, recours effréné à la planche à billets, inflation galopante, hausse des prix, risque de pénurie à grande échelle, baisse des salaires… le régime opte pour la stratégie du pire.
Renflouer les caisses de l’Etat en organisant une paupérisation à grande échelle est la marque d’un régime qui ne se soucie aucunement de sa population et qui n’hésite pas à lui faire porter le fardeau de l’inconséquence et de l’irresponsabilité. A certains égards, cette attitude relève de la perversion politique narcissique.
Faire payer le prix exorbitant de la gabegie et de l’incurie aux Algériens est une attitude politique dangereuse. Les Algériens ne sont pas près d’accepter des sacrifices quand ils ont conscience que l’impunité est devenue la norme et que la grande corruption a saigné le pays à travers de gigantesques transferts illicites vers l’étranger. Les Algériens seront d’autant moins enclins à subir une baisse de leur pouvoir d’achat qu’aucune perspective d’avenir ne leur est proposée.
Persister à faire le «dos rond» en espérant à terme une nouvelle embellie des courts de pétrole est un pari insensé. Le discours sur un «nouveau modèle de croissance» et sur la nécessité d’une «diversification de l’économie» apparaît comme une vaste fumisterie destinée à leurrer les partenaires étrangers.
Gagner du temps est en définitive l’unique leitmotiv de ceux qui veulent conduire le pays à la ruine. L’appel à la «résistance» du chef de l’Etat est pathétique. Au faste des années 2000 et des grands projets dits structurants, comme celui scandaleux de l’autoroute Est-Ouest, qui ont englouti des sommes faramineuses sans pour autant relancer l’économie succède un Etat de désarroi que reflète une pitoyable cacophonie gouvernementale.
Cette situation d’impuissance et l’entêtement à nier l’évidence et à tourner le dos aux réalités traduisent une inquiétante «bunkerisation» du régime. Ni le recours systématique à la brutalité, à la répression, au harcèlement judiciaire, aux menaces ne parviendront à endiguer les grandes révoltes sociales à venir.
Pourtant, le pays dispose encore de réserves financières encore suffisantes pour engager de véritables réformes économiques, en mobilisant les ressources humaines et financières du pays. Ces réserves doivent être mises au service d’un grand plan stratégique de développement du pays et non pas servir de filet protecteur à un système de pouvoir largement gangréné.
La paralysie actuelle, les luttes féroces au sein du régime, l’incapacité avérée du chef d’Etat à exercer ses fonctions laissent pointer l’irréparable. Le seuil de rupture risque d’être franchi plutôt que prévu et commande d’engager dans l’urgence des réformes politiques radicales.
Les législatives prévues en mai dans un contexte tragi-ubuesque seront un facteur supplémentaire d’aggravation de la défiance populaire. Elles doivent être momentanément suspendues.
Un dialogue sérieux doit s’engager alors avec l’ensemble des forces politiques et sociales du pays, y compris l’Armée, pour définir un grand consensus national autour des réformes politiques et économiques à entreprendre rapidement pour stopper cet engrenage mortel pour le pays. Plus vite sera concrétisé ce consensus historique, mieux notre indépendance sera défendue.
Rater cette chance historique reviendrait à remettre tôt ou tard le destin de notre nation entre les mains de l’étranger et, alors, seront définitivement enterrées les grandes promesses des pionniers du mouvement de libération nationale.
Aujourd’hui plus qu’hier, la responsabilité historique des dirigeants actuels est totalement engagée.
S. B.
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