Après le refus catégorique d’Alger : Al-Sarraj accepte de faire le gendarme pour l’Europe
Le gouvernement italien et l’Europe viennent de trouver une solution au refus catégorique de l’Algérie de jouer pour eux le gendarme au Sahel afin de stopper notamment les flux migratoires allant d’Afrique vers l’Europe. Cette tâche ingrate sera dorénavant confiée aux Touareg libyens et aux Toubous. Le ministre italien de l’Intérieur, Marco Minniti, a indiqué que des tribus du sud de la Libye ont signé vendredi à Rome un accord de paix en douze points qui prévoit, entre autres, un contrôle des 5 000 kilomètres de frontières. «Une garde frontalière libyenne sera opérationnelle pour surveiller les frontières du sud de la Libye sur 5 000 kilomètres», a précisé aujourd’hui Marco Minniti au journal La Stampa. «Sécuriser la frontière au sud de la Libye signifie sécuriser la frontière au sud de l’Europe», a-t-il ajouté, précisant que ce nouveau dispositif, dont les effectifs ne sont pas encore définis, complètera au Nord l’action des garde-côtes.
Selon la même source, «près de soixante chefs de tribus, notamment les chefs de la communauté toubou, de la tribu arabe des Awlad Suleiman et des Touareg, étaient à Rome pour s’entendre avec le gouvernement italien». Etait également présent un représentant du gouvernement libyen d’union nationale. Pour amener tout ce beau à accepter le deal, les Européens ont mis sur la table un gros paquet d’argent.
Le Gouvernement libyen d’union (GNA) est lui aussi partie prenante de l’accord. Le Premier ministre Fayez Al-Sarraj et son homologue italien Paolo Gentiloni avaient aussi signé le 2 février dernier un mémorandum d’accord visant à renforcer la lutte contre l’immigration clandestine depuis la Libye et prévoyant notamment la création de camps pour accueillir les migrants et les inciter à retourner dans leurs pays lorsqu’ils ne peuvent prétendre au statut de réfugié. Le Parlement de Tobrouk a toutefois refusé de valider cet accord.
Fayez Al-Sarraj – qui s’était déplacé en personne à cette réunion pour demander notamment 800 millions d’euros à l’Europe – avait à l’occasion renouvelé son engagement à jouer le gendarme de la rive sud. Ce n’est pas tout. En signant l’accord, Tripoli accepte néanmoins l’intervention militaire européenne sur son littoral et dans son désert. L’Algérie devait initialement aussi participer à la rencontre. La démarche du gouvernement italien n’a pas du tout été appréciée par le gouvernement algérien, qui avait demandé à revoir certains aspects de l’accord. Devant le refus italien et plus généralement des Européens de modifier les chapitres «litigieux», Alger a décidé tout simplement de faire l’impasse sur la rencontre.
Le message de l’Algérie était clair : l’Algérie ne signera pas un accord imposé par la rive nord et dont les clauses l’obligeraient à céder à des tiers une once de son pouvoir décisionnel souverain. Pour le gouvernement algérien, un tel accord n’était pas intéressant, surtout que les autorités algériennes font depuis des années un énorme effort pour bloquer les flux de l’immigration irrégulière vers l’Europe sans rien demander en contrepartie à Bruxelles. Le nombre d’Algériens qui débarquent sans visa sur les côtes méridionales de la péninsule est aussi dérisoire.
Khider Cherif
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