Le PDG d’ENI au tribunal de Milan : «Farid Bedjaoui était le messager de Chakib Khelil»
Le PDG du groupe pétrolier italien ENI, Claudio Descalzi, qualifie Farid Bedjaoui de «messager» et «informateur» de l’ancien ministre de l’Energie et des Mines, Chakib Khelil. Entendu le lundi 3 avril par le tribunal de Milan comme témoin dans l’affaire de soupçons de pots-de-vin versés par Saipem, filiale d’ENI, à des dirigeants algériens pour décrocher des contrats juteux avec Sonatrach, Claudio Descalzi a mis en avant le rôle d’intermédiaire joué par Farid Bedjaoui pour le compte de Chakib Khelil dans les négociations des contrats, a rapporté ce mercredi 5 avril le journal italien Repubblica.
Le PDG d’ENI confirme ainsi les soupçons qui pèsent sur Farid Bedjaoui, accusé d’être directement impliqué dans cette affaire de pots-de-vin entre Saipem et Sonatrach. «Farid Bedjaoui était présent dans toutes les réunions et toutes les discussions sur les contrats entre Saipem et Sonatrach, même s’il n’avait aucune qualité officielle. Je pense qu’il jouait le rôle de messager et d’ambassadeur du ministre algérien de l’Energie de l’époque (Chakib Khelil)», a répondu M. Descalzi à une question du procureur du tribunal de Milan sur les liens entre ENI-Saipem et Farid Bedjaoui.
Le PDG d’ENI a, en revanche, ardemment défendu l’intégrité de son prédécesseur, Paolo Scaroni, en excluant son implication dans ces transactions douteuses entre Saipem et Sonatrach. M. Descalzi a dit au juge qu’il ne savait pas si Paolo Scaroni avait rencontré Farid Bedjaoui durant son exercice. Le PDG d’ENI a beaucoup insisté, toujours selon Repubblica, sur le fait que Saipem était totalement autonome dans la gestion de ses affaires. «J’atteste que quand il était aux commandes d’ENI, Paolo Scaroni n’avait commis aucune interférence dans les affaires de Saipem, dotée d’une direction exécutive totalement libre d’agir», a-t-il assuré devant le juge milanais, précisant que «même s’il voulait interférer, il y a des procédures internes à l’entreprise qui ne lui auraient pas permis une telle action».
M. Descalzi a enchaîné dans son plaidoyer en faveur de l’ex-PDG d’ENI, en soulignant que «M. Scaroni n’a jamais traité les affaires opérationnelles de Saipem». Les déclarations du PDG d’ENI confirmaient donc la thèse selon laquelle Farid Bedjaoui, également poursuivi dans cette affaire et contre qui un mandat d’arrêt international a été lancé par le tribunal de Milan, «travaillait» pour le compte de Chakib Khelil comme intermédiaire.
Cette affaire de corruption transnationale a éclaté en 2011 à Milan. Elle concerne des pots-de-vin de 198 millions d’euros versés par Saipem à des responsables algériens en contrepartie de contrats avec Sonatrach d’une valeur de 8 milliards de dollars. A Milan, en plus de Paolo Scaroni, septe autres responsables de Saipem, mais aussi Farid Bedjaoui sont au banc des accusés. La même affaire instruite en Algérie est actuellement au point mort, après l’annulation des mandats d’arrêts internationaux lancés en été 2013 contre Chakib Khelil, sa famille et Farid Bedjaoui pour vice de forme.
Sonia Baker
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