Nouvelles révélations dans l’affaire du blanchiment de l’argent du kif par le Makhzen
Dans le prolongement de l’affaire révélée par Algeriepatriotique en novembre 2016, de nouveaux éléments sont venus confirmer l’ampleur des réseaux mis en place par le Makhzen pour blanchir l’argent de la drogue qu’il produit chez lui. Véritables circuits bancaires parallèles, ces réseaux s’étendent bien au-delà du continent africain. Ils sont aujourd’hui solidement enracinés en Europe où les bandes criminelles marocaines ramassent régulièrement de colossales sommes d’argent.
Une enquête minutieuse menée récemment par la justice française révèle que les revenus du cannabis sont transformés en or aux Emirats arabes unis ou en Belgique après avoir transité par la France. Le pot aux roses a été découvert après le démantèlement d’un des réseaux chargé justement de blanchir une partie appréciable de l’argent sale marocain. 27 personnes sont impliquées dans ce réseau tentaculaire dont les cerveaux sont Sayed Maricar, un Indien de 35 établi à Paris, et un certain Saraf qui jouait le rôle de «banquier». Ce dernier était directement mandaté par des trafiquants marocains. Les 27 personnes ont été renvoyées le 5 avril dernier en correctionnelle.
Selon la justice française, «le système était méticuleusement organisé entre l’Europe, le Maroc, les Emirats arabes unis et l’Inde, aussi sophistiqué dans son architecture qu’artisanal dans ses méthodes». Saraf chargeait des «collecteurs» en France de rassembler l’argent du trafic de drogue. L’argent était ensuite remis aux équipes de Sayed Maricar qui le convoyaient jusqu’à Dubaï ou en Belgique, où il était converti en or. Le précieux métal était à son tour acheminé aux Emirats arabes unis ou en Inde. Là, il servait généralement à l’acquisition de biens immobiliers. Il est également établi que c’est avec une partie de cet argent que le Maroc finance ses opérations clandestines et rémunère certains des groupes terroristes qui déstabilisent actuellement le Sahel.
Une source proche du dossier a confié à la presse française que les sommes blanchies sont colossales. Une ordonnance établie par les juges chargés de l’affaire montre que Sayed Maricar a récupéré de mars 2010 à octobre 2012 près de 109 millions d’euros et de mai 2013 à mars 2014 plus de dix millions. A elle seule, une des «mules» du réseau a raconté aux enquêteurs avoir procédé à 41 collectes d’argent pour un montant de près de 5,7 millions. Sayed Maricar s’appuyait aussi sur des sociétés qui lui permettaient, via des fausses factures, de justifier le transport d’or.
Cette enquête a été baptisée «Rétrovirus», en référence au dossier «Virus», une autre affaire de blanchiment du trafic de stupéfiants qui utilisait des fraudeurs fiscaux, notamment une élue écologiste parisienne, pour réinjecter l’argent du cannabis. Il s’agit de deux circuits de blanchiment parallèles. Après le démantèlement de «Virus» en 2012, les trafiquants se sont rabattus sur «Rétrovirus».
En Afrique, où les pays sont moins outillés que la France pour lutter contre le crime, la pègre marocaine n’hésite pas à placer directement les revenus de la drogue chez Attijariwafa Bank, un établissement bancaire marocain qui possède des succursales dans toutes l’Afrique de l’Ouest. Malgré la bienveillance des autorités de ces pays et malgré le système de blanchiment efficace, des experts antiterroristes ont pu établir, durant les années 2000, l’existence de liens clairs entre le Makhzen, le trafic de cannabis et le terrorisme. Les réseaux marocains de trafic de drogue écoulent même de la cocaïne provenant d’Amérique latine. Il est à rappeler que le Maroc est le premier producteur au monde de résine de cannabis. Ce trafic prospère toujours au vu et au su des autorités marocaines.
Khider Cherif
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