L’ambassadeur du Maroc à New York : entre délire monomaniaque et manipulation
Intervenant à l’issue de l’adoption à l’unanimité par le Conseil de sécurité, le 28 avril 2017, d’une résolution prorogeant d’un an le mandat de la Mission des Nations unies pour le référendum au Sahara Occidental (Minurso), l’inénarrable représentant du Maroc auprès des Nations unies, Omar Hilale, s’est livré avec son ton fielleux habituel à une attaque en règle contre l’Algérie qu’il cite pas moins de 33 fois en l’espace de 30 minutes.
Dans une litanie de contre-vérités, de contradictions, d’injures et de formules vaseuses et ubuesques, ce serviteur servile et zélé du Makhzen, agent sans foi ni loi connu pour son comportement de mercenaire et ses pratiques de voyou intimidant et corrupteur, comme le révèlent les câbles fuités par le célèbre hacker «Chris Coleman», a fait un show minable en égrainant une série de griefs à l’endroit du Polisario et, en particulier, de l’Algérie, en présentant son pays comme un modèle de démocratie, défendant la légalité internationale et soucieux du bien-être des Sahraouis dans les camps de réfugiés de Tindouf. Quel dommage que le ridicule ne tue point !
Retour sur les principales séquences de la déclaration du représentant du Maroc
En réponse à une question de la correspondante de l’APS qui l’interrogeait sur la situation insurrectionnelle au Rif sur fond de mal-vivre et de répression policière, Omar Hilale, qualifié par Amar Belani de troll et de faussaire dont la spécialité première est d’altérer la vérité (y compris dans les notes qu’il adresse à sa hiérarchie), a préféré «cacher le soleil avec un tamis» en présentant son pays comme un modèle de démocratie et de respect des droits de manifestation et d’expression. Dans un élan auto-enthousiasmé pour étayer ses propos, il a omis de citer la répression sanglante qui s’abat sur les populations du Rif, aux prises avec une situation socioéconomique éprouvante, notamment l’épisode horrible du marchant de poisson broyé par une benne à ordures sur ordre d’un représentant de l’ordre marocain.
A court d’arguments probants, ce diplomate marocain n’a rien trouvé de mieux que de s’attaquer frontalement à l’Algérie en l’accusant de tous les maux, une pratique connue qui consiste à édulcorer une réalité socioéconomique interne des plus préoccupantes à travers un discours d’autosatisfaction et d’images surfaites, contredisant ce faisant les rapports alarmants des institutions financières internationales et les témoignages des acteurs associatifs marocains, notamment ceux de la région du Rif.
En témoigne l’entretien accordé par le président de la région d’Al-Hoceima, Ilyas El-Omari, à l’hebdomadaire Jeune Afrique, dans lequel il impute la colère des Rifains au chômage endémique qui touche la population et le peu d’intérêt qu’accorde le pouvoir central à la région. Ilyas El-Omari parle carrément de région abandonnée et plongée sciemment dans la pauvreté pour qu’elle devienne une énorme plantation de cannabis dont le commerce représente aujourd’hui 81% de l’économie de la région (23 milliards de dollars et 23% du PIB du Maroc). Et cet élu de regretter que l’argent de la drogue ne soit plus réinvesti dans la région, comme c’était le cas avant, laissant entendre que le produit de la vente du cannabis, qui concourrait avant 2008 à l’essor économique de la région, emprunte désormais d’autres canaux, et quand il n’enrichit pas l’élite au pouvoir, sert à financer des OPA en Afrique via des banques marocaines servant de circuit de blanchiment d’argent.
Ces faits sont, d’ailleurs, soulignés dans le rapport 2016 de Frontex intitulé «Africa-Frontex Intelligence Community Joint Report», dans lequel cette agence européenne affirme que le trafic de drogue est l’activité la plus rentable pour les groupes de criminels activant au nord du Maroc, relevant que le trafic de hachich, en tant qu’activité «à faible risque et aux profits élevés», reste un domaine plus attractif pour ces groupes que le trafic de migrants. Ce rapport confirme les conclusions d’un autre rapport publié par le Département d’Etat américain, selon lequel «la production totale de cannabis au Maroc en 2015-2016 est estimée à 700 tonnes métriques, ce qui, potentiellement, équivaut à 23% du PIB marocain». Ce qui fait du Maroc le premier producteur et exportateur mondial de cannabis. Afin de lutter contre ces phénomènes, l’administration américaine chargée de la lutte contre la drogue (Drug Enforcement Administration/DEA) a, d’ailleurs, ouvert en février dernier son premier bureau régional en Afrique, à Rabat !
Faux-fuyants et rhétorique mensongère
Sur la question du Sahara Occidental, où le Maroc a notoirement le statut d’occupant au regard du droit international, Omar Hilale a tenté à coups de faux-fuyants et de rhétorique mensongère de dédouaner son pays de toute responsabilité dans la genèse et la persistance de ce conflit.
Faisant une lecture biaisée de la résolution adoptée par le Conseil de sécurité, ce diplomate se félicite d’abord que les quinze membres de cet organe de l’ONU aient fait pression sur les pays voisins, particulièrement sur l’Algérie, pour «négocier avec le Maroc le règlement de ce différend régional», ce qui n’est nullement reflété dans le texte du conseil. En effet, la résolution 2351 adoptée le 28 avril 2017 ne fait qu’encourager les pays voisins, sans les nommer, à contribuer pour mettre fin à l’impasse actuelle et progresser dans la voie d’une solution qui pourvoit à l’autodétermination du peuple du Sahara Occidental, ce qu’ils ont déjà fait à travers leur participation, en qualité d’observateurs, au processus de Manhasset.
Pour rappel, ce processus est à l’arrêt depuis que le Maroc a décidé unilatéralement de remettre en cause la dynamique onusienne, en mettant en doute la sincérité et la probité de l’Envoyé personnel du Secrétaire général de l’ONU et, ensuite, en considérant l’option référendaire comme définitivement écartée, contrevenant ainsi à l’appel répété du Conseil de sécurité à la reprise des négociations de bonne foi et sans conditions entre le Maroc et le Front Polisario.
Ce faisant, le Maroc a pu compter sur le précieux soutien de la France et de l’Espagne, membres influents du «Groupe des amis du Sahara Occidental», qui prend traditionnellement l’initiative de présenter, avec les autres membres du Groupe (Etats-Unis, Russie, Chine et Royaume-Uni), au reste des membres du Conseil de sécurité un projet de résolution sur le Sahara Occidental, avec pour consigne implicite de ne pas le modifier. Ces deux alliés inconditionnels du Maroc ont de par le passé ferraillé dur pour empêcher l’inclusion dans la résolution du conseil d’un appel à la mise en place d’un mécanisme de monitoring des droits de l’Homme et pour biffer toute formule de condamnation suite à l’expulsion par le Maroc de la composante civile de la Minurso. C’est également fort de leur soutien indéfectible qu’Omar Hilale a lancé, toute honte bue, un ultimatum de 48 heures au système des Nations unies, l’enjoignant d’apporter la preuve du retrait total des éléments du Front Polisario de la zone tampon de Guerguerat, faute de quoi, il ne s’engagera pas dans les négociations auxquelles l’oblige le Conseil de sécurité, défiant ainsi l’autorité de cet organe en tant que garant de la paix et de la sécurité dans le monde.
Pris sous le feu des projecteurs des médias de son pays, mobilisés en grand nombre pour la circonstance, Omar Hilale s’est permis de prédéterminer à l’avantage de son pays, qui a le statut de puissance occupante, les paramètres de la solution au conflit du Sahara Occidental. Il a estimé que la résolution du Conseil de sécurité consacrait la prééminence de l’option marocaine d’autonomie, qui est, selon lui, «la seule solution viable à ce différend régional». Mais il a omis de mentionner que la proposition du Front Polisario pour une solution sur la base d’un référendum d’autodétermination reste sur la table et qu’elle figure parmi les options à examiner, ce qui ressort clairement dans le texte de la résolution et des déclarations après le vote des membres du Conseil de sécurité, notamment de la Suède, de l’Ethiopie, de l’Uruguay et de la Bolivie.
Invective et discours farfelu
Puisant dans le registre de l’invective et du discours farfelu, l’ambassadeur du Maroc a remis sur le table les allégations de détournement par l’Algérie et le Front Polisario de l’aide humanitaire européenne destinée aux réfugiés sahraouis et des supposés obstacles dressés par l’Algérie sur la voie du recensement de ces derniers. Il convient de rappeler qu’outre le fait que le rapport de l’Office européen de lutte contre la fraude (Olaf) n’incrimine pas les autorités algériennes, ces accusations ont été battues en brèche par de hauts responsables européens qui ont confirmé que l’assistance humanitaire européenne aux réfugiés sahraouis se poursuit normalement dans un cadre ordonné et transparent. En fait, ces accusation participent de calculs marocains visant à faire pression sur l’UE pour diminuer ou suspendre son aide aux réfugiés sahraouis ou y introduire de nouvelles conditionnalités, afin d’asphyxier économiquement les Sahraouis et les pousser à choisir de rejoindre les appels de la «mère patrie».
Sur un autre registre, et pour infirmer les accusations d’exploitation illégale par le Maroc des ressources naturelles du territoire du Sahara Occidental, Omar Hilale fait étalage des prétendus efforts consentis par le royaume pour la construction d’infrastructures dans «ses provinces du Sud». Mais il omet, là aussi, de préciser que celles-ci profitent d’abord aux Marocains de pure souche, implantés artificiellement sur le territoire, et que ces investissements ont été réalisés en violation flagrante du principe de souveraineté permanente des populations des territoires non autonomes sur les ressources naturelles. Rien d’étonnant quand on sait que l’arrêt de la Cour de justice européenne du 21 décembre 2016 pend au nez des autorités marocaines en ce qu’il établit clairement que le territoire du Sahara Occidental est distinct et séparé de la souveraineté du Maroc.
Enfin, avec ses attaques méchantes et gratuites contre Christopher Ross, cet agité du bocal se vautre dans le caniveau, oubliant que le Néerlandais Van Walsum (ancien Représentant personnel du SG de l’ONU pour la question du Sahara Occidental) aura, lui, été le meilleur diplomate que le Maroc ait eu durant les soixante dernières années. Il est vrai qu’entre temps, d’autres «petits soldats» ont été soudoyés à Genève par le diplomate corrupteur et le net fourmille de détails sur les accointances rétribuées avec de tristes sires, du genre Kompass, Khan et autres comparses aussi cupides qu’intéressés.
Amar B.
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