Affaire Vizada : un refus de renouvellement de licence entaché de vices de forme (II)
Des sources informées ont révélé à Algeriepatriotique que l’ARPT a affirmé dans de nombreux courriers adressés à Vizada-Algérie que la licence dont disposait cette société était «en instance de renouvellement», ce qui pour le titulaire «révélait a priori l’absence de motifs bloquants pouvant contrevenir» à l’aboutissement favorable de la demande de renouvellement, d’autant qu’une visite d’inspection avait été effectuée par les effectifs du régulateur au mois de novembre 2015 sur le site de l’opérateur.
«La décision de non-renouvellement de la licence a été notifiée au titulaire le 6 décembre 2016 par simple courrier de l’ARPT, sans que l’opportunité ne soit donnée à Vizada-Algérie de s’expliquer sur les supposés manquements dont il lui a été fait grief en ampliation de la décision de refus de renouvellement», regrettent nos sources, estimant que «cette manière de procéder constitue une violation patente tant des formes que des procédures édictées par les textes en pareille matière». En effet, l’annulation de la licence n’a été précédée d’aucune notification constatant d’éventuels manquements. Bien au contraire.
Or la loi stipule que «lorsque l’opérateur bénéficiaire de licence d’établissement et d’exploitation de réseaux publics ne respecte pas les conditions qui lui sont imposées par les textes législatifs et réglementaires, l’Autorité de régulation le met en demeure de s’y conformer dans un délai de trente jours». Devant cette situation aberrante, les juristes avancent deux hypothèses : «La lecture des dispositions et leur confrontation avec la situation dans laquelle est mise Vizada-Algérie aujourd’hui laissent supposer soit que l’ARPT a manqué à sa mission de veille et de sommation préalable à toute sanction (…), soit que l’instruction à charge de la demande de renouvellement de la licence procède d’un examen biaisé du dossier de Vizada-Algérie qui en supporte les frais.» De plus, en cas de refus, les textes en vigueur prévoient que le titulaire soit notifié de la décision de non-renouvellement – et avec motivation – au moins six mois avant l’expiration de la période de validité de ladite licence. En l’absence de pareille notification, la licence est réputée renouvelée.
Nos sources dénoncent «l’irrespect des procédures légales et réglementaires» qui «constitue un motif suffisant aux actionnaires de Vizada-Algérie pour qu’ils puissent envisager d’introduire des actions auprès des juridictions compétentes, locales et étrangères, lesquelles devraient aisément faire droit aux demandes de Vizada-Algérie ou de ses actionnaires et mettre en difficulté les institutions du secteur s’agissant de l’argumentaire développé pour s’opposer au renouvellement de la licence de l’opérateur GMPCS».
Lettre de Vizada-Algérie à la ministre
Dans un courrier sans ambages adressé à la ministre de la Poste et des TIC, le directeur de Vizada-Algérie a affirmé qu’il ne se résoudrait pas «à accepter une décision qui nuit» aussi bien à l’opérateur qu’à ses employés et à ses clients. «Il nous incombe, a-t-il écrit à la ministre, de (les) protéger au moyen du déploiement de l’ensemble des mécanismes qui nous sont offerts par les dispositifs textuels internes et internationaux». Vizada-Algérie dénonce ces pratiques qui pourraient «affecter encore une fois les gages de stabilité et de sécurité des opérateurs économiques étrangers en Algérie, en particulier dans le secteur des nouvelles technologies».
Le directeur de Vizada-Algérie a mis en avant «la fragilité des fondements avancés pour le non-renouvellement de la licence et l’irrespect des procédures légales et réglementaires pour le prononcer». Des fondements qui «constituent des motifs suffisants aux actionnaires de Vizada-Algérie pour qu’ils puissent éventuellement envisager les actions idoines pour réhabiliter leur société dans son statut d’opérateur titulaire d’une licence et demander les réparations équitables et nécessaires suite aux mesures et allégations dont elle fait l’objet».
La société lésée envisage de recourir aux juridictions nationales, mais aussi internationales, tels que le Centre international de règlement des différends relatifs à l’investissement entre Etats et ressortissants d’autres Etats (Cirdi) ou la Commission des Nations unies pour le droit commercial international (Cnudci). Vizada-Algérie estime, en effet, que la décision dont fait l’objet ce fournisseur de services «ne peut être soutenue en droit, ni du point de vue de la procédure prévue par les textes régissant le secteur des TIC, ni au plan du fond qu’il soit appréhendé à travers le prisme du droit des télécommunications, du droit des affaires ou du droit des investissements».
Mais Vizada-Algérie affirme privilégier, «pour l’heure», une démarche «bien plus saine, moins dommageable pour l’image du secteur et plus avantageuse pour la préservation de la crédibilité du cadre institutionnel afférent à l’investissement étranger en Algérie». Pour éviter de recourir à la justice, elle exhorte la ministre de la Poste et des TIC à «permettre le réexamen (du) dossier sur une assise légale, objective et équitable, et de reconsidérer la décision prise à l’encontre de Vizada-Algérie».
Par cette entrave à une entreprise qui s’est installée dans notre pays et qui emploie des compétences algériennes, la ministre de la Poste et des TIC et l’ARPT concourent à éloigner les investissements directs étrangers et à donner une mauvaise image du climat des affaires en Algérie. Le dossier s’ajoute aux nombreux autres qui ont été révélés par Algeriepatriotique en leur temps et dont aucun n’a connu une quelconque amélioration depuis.
Karim B.
(Suivra)
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