Sud de la Tunisie : l’intervention de l’armée aggrave la crise et accentue la dissidence
La situation à Tataouine, dans le sud de la Tunisie, s’envenime depuis l’ordre donné à l’armée par le président Béji Caïd Essebsi d’intervenir pour protéger les sites de production contre des manifestations qui commencent à prendre un caractère insurrectionnel. Ainsi, les manifestants, selon la chaîne Al-Jazeera, menacent de fermer tous les axes empruntés par les compagnies étrangères pour accéder aux champs pétroliers et gaziers, bravant ainsi la décision du chef de l’Etat, qui a enjoint à l’armée d’intervenir en cas de menace contre tout site de production.
Un porte-parole des manifestants a déclaré que «la protestation pacifique se poursuivra pour défendre le droit de la population locale au développement, au travail et aux richesses naturelles». Il considère que le discours du Président «n’était pas à la hauteur» et que les manifestants étaient «prêts au dialogue, à condition d’accorder à cette région marginalisée ses droits», tout en se défendant de vouloir provoquer la «fitna» ou «la division du pays». Tout ce qu’ils veulent, c’est leur «part des richesses du pays», réclament les manifestants.
Selon les observateurs de la scène tunisienne, ils disent s’attendre, en cas d’intervention de l’armée suivant les injonctions du chef de l’Etat, à des affrontements qui plongeront le pays dans un nouveau cycle de violences. Essebsi va-t-il alors céder aux critiques de l’opposition, qui lui reprochent une «grave cécité politique» qui risque de mener le pays à l’explosion, et renoncer à sa décision ? Va-t-il sacrifier à nouveau son gouvernement qui peine à redresser la situation économique désastreuse pour sauver la face devant la rue qui gronde ?
Soulagés un moment par la défaite des islamistes aux premières élections organisées après la chute de Ben Ali, en 2011, les Tunisiens ont vite été rattrapés par la crise sociale, aggravée par le recul assez durable des rentrées touristiques dues à la vague d’attentats qui a secoué le pays en 2015 et 2016.
R. Mahmoudi
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