Le Drian ou la poursuite de la doctrine française au Mali
La désignation de Jean-Yves Le Drian par le président français Emanuel Macron pour diriger le département des affaires étrangères n’a pas constitué une surprise pour les observateurs avertis de la scène politique de l’Hexagone.
Au-delà des commentaires dithyrambiques sur Le Drian, présenté comme «un ami de l’Algérie», il convient de s’interroger sur le choix du président français dans le contexte des relations algéro-françaises.
Le quotidien français Libération titrait au lendemain de l’élection de Macron à la tête de la présidence française : «Au Mali, jusqu’où Macron suivra-t-il François Hollande ?» et a repris la déclaration du général français Jean-Paul Paloméros, selon lequel, au Sahel comme au Moyen-Orient, «l’engagement militaire français va se poursuivre sous sa forme actuelle».
De plus, selon un rapport très récent de la Fédération internationale des droits de l’Homme (FIDH), le Mali a atteint «un niveau d’insécurité sans précédent», la situation ne s’améliorant guère. Les «385 attaques qui ont coûté la vie à au moins 332 personnes, dont 207 civils, dans le nord et le centre du pays» en 2016, ainsi que les «621 cas de torture, enlèvements, détentions arbitraires et extorsions de tous types» répertoriés par l’ONG montrent que «les actes de violence augmentent au lieu de diminuer».
Au fil des mois, l’opération Barkhane est devenue un permis de tuer, concluent les observateurs. Pourtant, son principal artisan, Jean-Yves Le Drian, soutien de poids du nouveau président français qui vient d’en faire le porte-parole de sa diplomatie étrangère. «Au cours des cinq prochaines années, l’opération française au Sahel pourrait bien être infléchie, redéfinie, complétée, voire redimensionnée par Emmanuel Macron, mais il est difficile de l’imaginer liquider le grand-œuvre du ministre de la Défense», écrivait la publication française.
Pour nous, l’intervention militaire française au Mali en 2013, même sous couvert de l’ONU, a été une catastrophe. Elle a ouvert la boîte de Pandore et mis toute la sous-région sahélo-saharienne dans une instabilité crisogène. Dès lors, les observateurs sont sceptiques concernant le changement de cap du nouveau locataire de l’Elysée par rapport à la présence française au Mali, en raison des intérêts bien compris du complexe militaro-industriel français, et l’élection de Le Drian au Quai d’Orsay n’est pas de bon augure pour le règlement politique, pacifique et global de la crise malienne, tel que stipulé par l’Accord d’Alger signé par toutes les composantes actives du pays frère et voisin et parrainé par l’Algérie.
Ramdane Yacine
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