Un gouvernement aux accents militaristes
La nomination de l’ex-ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian aux Affaires étrangères dans le premier gouvernement de l’ère Macron marque très clairement un choix, celui d’arrimer la diplomatie française, jugée timorée depuis le départ de Laurent Fabius, aux enjeux géostratégiques liés aux conflits armés qui secouent plusieurs régions de la planète.
Ainsi, l’expérience acquise par Le Drian dans la gestion de l’intervention française au Mali, aussi chaotique soit-elle, durant eux ans, pourra justement servir pour un redéploiement diplomatique freiné par les échecs répétés de Paris, notamment dans la crise syrienne.
C’est aussi un signe que la France compte bien avoir une conduite plus offensive, plus militariste, dans la conjoncture actuelle, dans laquelle elle doit faire face, non seulement au défi terroriste mais aussi aux pressions prévisibles sur l’Otan. C’est d’ailleurs avec une certaine anxiété que le commandement de l’Alliance atlantique prépare la visite de Donald Trump dans les tout prochains jours. La raison est que l’Occident est divisé sur le sens même à donner au déploiement militaire, entre ceux qui poussent l’Otan à un interventionnisme inconditionnel et ceux qui sont moins enthousiastes et qui, comme Trump, critiquent ouvertement sa posture actuelle.
Le Drian continuera aussi à s’occuper de la situation au Mali mais, cette fois-ci, en tant que chef de la diplomatie. Il sera attendu de lui qu’il œuvre rapidement pour le renforcement de la position française en Libye où la France n’a jamais réussi à activer réellement son jeu, en dépit de ses multiples tentatives de s’ingérer dans le processus en cours. Il pourra aussi relancer le vieux projet d’intervention armée à partir du sud de la Libye, sous prétexte de repousser l’afflux des armes et des groupes djihadistes qui s’infiltrent vers le Tchad où la France a installé le QG de son opération dite «Berkhane», à travers laquelle les Français ont décidé, en 2015, d’étendre leurs opérations de lutte contre Al-Qaïda à toute la région du Sahel.
Autre signe de militarisation de l’Exécutif français : la rebaptisation du ministère de la Défense en ministère des «Armées», un concept qui a disparu depuis 1974, et qui est un des vestiges de la IVe République, qui a mené les guerres contre les mouvements de libération en Afrique et en Asie. Plus que symbolique, cette désignation corrobore, en fait, un état d’esprit plus belliciste ou, en tous les cas, plus offensif que le précédent gouvernement qui a voulu faire la guerre par la diplomatie. L’actuel veut faire le contraire : faire la diplomatie par les armes.
R. Mahmoudi
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