L’argument fallacieux d’Al-Sissi
Par Sadek Sahraoui – Le gouvernement égyptien a clairement exploité l’attentat ayant ciblé vendredi un bus de chrétiens coptes dans le sud du Caire pour donner un coup de pouce au commandant en chef de l’Armée nationale libyenne (ANL), le maréchal Khalifa Haftar. L’argument avancé par le gouvernement égyptien pour bombarder des positions d’Ansar al-charia dans l’est de la Libye ne tient pas la route pour la bonne raison que ce groupe terroriste est affilié à Al-Qaïda et non pas à Daech, organisation qui a revendiqué le massacre de Minya. Ansar al-charia ne peut donc être tenu pour responsable de ce qui s’y est produit.
Mais dans la confusion générale, Le Caire s’est certainement dit qu’il avait là une occasion en or pour nettoyer la ville de Derna d’Ansar al-charia afin de permettre au maréchal d’assoir davantage son emprise sur la Cyrénaïque et d’étendre son territoire à la Tripolitaine. Cet épisode fournit la preuve incontestable que l’Egypte veut donner au maréchal Khalifa Haftar un avantage militaire suffisamment important pour qu’il puisse écraser tous ses rivaux et prendre le pouvoir. Le président Abdelfattah Al-Sissi est soutenu dans sa démarche par les Emirats arabes unis et certaines capitales occidentales.
Le bombardement par l’armée de l’air égyptienne de la ville de Derna fait clairement de l’Egypte un protagoniste de la crise. Le Gouvernement d’union nationale (GNA), dirigé par Faïz Al-Sarraj, a raison, sans aucun doute, de protester, comme il l’a fait contre cette intervention et de la qualifier d’ingérence dans les affaires internes de la Libye. Il s’agit effectivement d’une ingérence quand bien même les chasseurs égyptiens ont ciblé une localité tenue par Ansar al-charia.
Les protestations du GNA sont légitimes, d’autant que l’Egypte n’a pas obtenu de mandat de l’ONU pour bombarder Derna. Face à un tel acte d’hostilité, il peut paraître légitime pour le GNA de faire appel lui aussi à ses alliés extérieurs pour se défendre. Si cela venait à se produire, il est à parier que la Libye ne tardera pas à imploser. Le scénario ne déplairait pas aux Egyptiens qui voient dans le croissant pétrolier libyen une solution à tous leurs soucis d’argent.
S. S.
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