La Franco-algérienne Leïla Aïchi future députée mais au prix du renoncement
Leïla Aïchi, la candidate indépendante pour la 9e circonscription des Français de l’étranger, a rencontré à Paris, mardi 13 juin, des responsables du Parti pour l’authenticité et la modernité (PAM). Cette entrevue, loin d’être une simple «visite de courtoisie», intervient la veille de la visite du chef de l’Etat français au Maroc et à quelques jours du second tour des législatives. Difficile de ne pas y avoir une combine de circonstance et un appel du pied en direction des Marocains. Le PAM est le deuxième parti du royaume, et à ce titre, il serait visiblement tout indiqué pour apporter l’absolution dont aurait besoin Leïla Aïchi pour qu’elle se préserve du courroux des Marocains et s’assurer les suffrages des Français résidant au Maroc.
La démarche de Leïla Aïchi, tendant à renouer les liens avec la classe politique marocaine, pourrait aussi d’une certaine façon donner une explication à l’interview qu’elle a accordée à un site électronique algérien, un site réputé très clément et bienveillant à l’égard de la monarchie, tout en ayant refusé les demandes répétées d’Algeriepatriotique.
Sans investiture de la République en Marche !, le mouvement d’Emmanuel Macron, dont elle se réclame pourtant, ni d’une quelconque autre entité, excepté le Modem, son parti qui l’avait proposée au début, mais qui s’est tu et n’est intervenu à aucun moment sur l’aventure riche en péripéties de Leïla Aïchi, cette dernière s’est accrochée et est restée déterminée à aller jusqu’au bout de sa démarche.
Aller au bout de (son) action, c’est louable en soi, mais à quel prix ?
Pour rappel, Leïla Aïchi est anciennement militante du parti écologiste EELV, sous les couleurs desquelles elle fut élue, en septembre 2011, sénatrice de Paris.
Celle-ci soutint Valérie Pécresse du parti de la droite, LR, contre Claude Bartolone, du PS, lors des élections régionales de 2015, date à laquelle elle fut exclue des rangs du parti écologiste. La décision de Leïla Aïchi de ne pas soutenir le président de l’Assemblée nationale de l’époque, candidat de la coalition PS-EELV-PC, laquelle coalition lui avait permis d’être élue, était vécue comme une forme sinon de trahison, tout au moins perçue comme de l’ingratitude.
Leïla Aïchi rejoint finalement le Modem de François Bayrou, en septembre 2016, à l’époque en pleine traversée du désert. Très affaibli suite aux désertions massives des cadres, le Mouvement démocrate était à la recherche d’élu(e)s et de militant(e)s de base d’où qu’ils vinrent.
Le ralliement de François Bayrou au mouvement En Marche !, en février dernier, puis le refus d’Augustin Augier, le fils de Marielle de Sarnez, l’actuelle ministre des Affaires européennes, de briguer la 9e circonscription des Français de l’étranger, ont rendu possible l’investiture de la sénatrice de Paris. Sauf qu’au même moment, un autre expectant et non moins transfuge d’un parti socialiste en plein déclin a convoité la même région, Afrique du Nord et de l’Ouest. Il faut bien reconnaître que le Franco-Marocain M’jid El-Guerrab a utilisé tous les moyens, y compris mettre en branle tous les lobbies pro-marocains actifs ou dormants, pour contraindre le mouvement En Marche ! à faire marche arrière. Emmanuel Macron a fini par céder aux pressions en retirant l’investiture de Leïla Aïchi pour avoir, à juste raison, dénoncé «l’alignement systématique de la France sur la politique marocaine au Sahara Occidental, et ce, malgré les graves violations des droits de l’homme constatées par les ONG humanitaires». Ce sont ses propos. Il aurait fallu les assumer jusqu’au bout, gage d’une constance et d’un courage politique, face à la République en marche, le parti du Président, en passe d’ameuter tous les opportunistes de France.
Bien que sa candidature lui ait été retirée sans qu’Emmanuel Macron ne s’en émeuve, Leïla Aïchi continue de s’en réclamer, tout comme d’ailleurs son adversaire, créant de fait une situation ubuesque dans cette région. S’agissant de ses positions antérieures, Leïla Aïchi semble les avoir reniées et remises aux calendes grecques pour s’assurer les suffrages de (ses) compatriotes établis au royaume chérifien.
De Paris, Mrizek Sahraoui
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