Contribution – «L’indigène» Boudiaf à l’ombre de «Madame» Simone Veil
Par Youcef Benzatat – Ni les mensonges, ni les enfouissements volontaires de l’histoire des grands hommes ne sont éternels. Ils finiront toujours par se dévoiler dans la vérité de l’histoire pour les réhabiliter dans toute leur splendeur. Leurs grandes œuvres s’inscriront en lettres d’or sur les frontons des édifices publics, des lieux de mémoire et dans les manuels d’instruction de générations entières d’enfants de la nation sitôt après la disparition des tyrans qui entravaient leur surgissement dans la conscience collective.
Quand le peuple est vaincu, de tout temps ses héros sont cyniquement acculés à l’oubli. Le 25e anniversaire de l’assassinat de l’un d’entre eux, Si Tayeb El-Watani, après son retour d’exil pour parachever le combat libérateur qu’il a initié avec ses compagnons, pour beaucoup d’entre eux happés par la traîtrise et la lâcheté dans une mort cruelle, fut assassiné une seconde fois par le mépris de la tyrannie qui sévit sur le peuple et sur le pays. Pas un mot, pas la moindre évocation de sa mémoire à l’occasion de ce tragique et sinistre anniversaire.
Comme au temps des bachaghas, des caïds et des harkis glorifiant leurs maîtres, autrefois geôliers de leur peuple, contre une soupe froide dans le déshonneur et l’avilissement. Une soupe froide qui se compte aujourd’hui en dividendes de la rente extraite du sous-sol que les héros de la nation avaient libérée par leur sacrifice et leur abnégation. Contre un soutien de leur régime tyrannique, liberticide et corrompu.
Ce régime a rendu un grand hommage à Simone Veil, parce qu’élevée en symbole dans son pays, où elle a révolutionné les mœurs, en militant pour le droit à l’avortement qui libéra la femme des chaînes d’une tradition misogyne millénaire. Plus qu’un symbole de la libération de la femme dans son pays, elle est surtout élevée au statut de stigmate parmi les rescapés de la Shoah et fait partie de ces nombreux gages pour la réhabilitation d’une France collaboratrice avec le fascisme. Une marque d’allégeance et de soumission. Car, chez nous autres, la pratique de l’avortement est pénalisée par ces mêmes tyrans qui prennent en otages l’histoire et la mémoire de notre peuple. Voire encouragée et institutionnalisée comme pénalisation pour servir de prétexte au maintien de la femme dans un statu pré-politique pour mieux dominer la société.
Ce régime a rendu un grand hommage à ce symbole de la lutte pour les droits de la femme et autre symbole antifasciste, malgré sa complicité active avec le sionisme colonialiste et coupable d’apartheid jusqu’à sa forme extrême : le génocide des Palestiniens qui se consument à petit feu devant le silence, la démission et la complicité du monde dit libre.
Le silence apposé à la mémoire du 25e anniversaire de l’assassinat de l’infatigable combattant contre la barbarie coloniale Mohamed Boudiaf, et l’hommage rendu à la disparition de la colonialiste, complice d’apartheid et de génocide programmé des Palestiniens, Simone Veil, est la dérive de trop qui renvoie l’histoire avant le commencement du combat libérateur du joug colonial par une redistribution des statuts d’indigène à l’ombre des maîtres colonisateurs.
Y. B.
Comment (18)