Racistes ?
Par Sadek Sahraoui – Les propos frisant le racisme tenus la semaine dernière par Ahmed Ouyahia, secrétaire général du RND, concernant les migrants, relèvent d’une forme de masochisme politique, dont malheureusement de nombreux responsables algériens sont devenus de grands adeptes. Les Algériens maîtrisent l’art difficile de se tirer eux-mêmes une balle dans le pied.
En s’en prenant d’une manière aussi ignominieuse aux Subsahariens, le directeur de cabinet du président de la République se fait complice – sans le vouloir – des stratagèmes déployés depuis un temps par nos ennemis pour donner de l’Algérie l’image d’un pays encore prisonnier de la barbarie, et dilapider tout le capital sympathie engrangé en Afrique et ailleurs par les Algériens depuis l’indépendance.
Le discours d’Ouyahia a tendance, en effet, à accréditer l’idée soutenue par nos ennemis que l’Algérie, La Mecque des révolutionnaires, a progressivement laissé place à La Mecque des racistes. Pourtant, rien n’est moins vrai. Malgré les sorties aussi regrettables que condamnables de gens comme Ouyahia, l’Algérie est un pays qui n’a jamais repoussé les migrants ou les réfugiés. Et cela continue.
Les différentes opinions qui n’hésitent pas aujourd’hui à tomber à bras raccourcis sur l’Algérie ont tendance à oublier un peu trop vite que le peuple sahraoui aurait sans doute été décimé en 1975 par l’armée marocaine si l’Algérie n’avait pas accepté d’ouvrir ses portes. Ces réfugiés dont les têtes étaient mises à prix par feu Hassan II se trouvent encore chez nous plusieurs décennies après.
L’Algérie n’a pas hésité également à accueillir un grand nombre de rescapés palestiniens des massacres de Sabra et Chatila. Des massacres commis, faut-il le souligner, non pas par des Israéliens, mais par des phalangistes arabes. Est-il besoin de rappeler également qu’à chaque fois qu’il y a une rébellion au Sahel, c’est en Algérie que les populations civiles viennent se réfugier. Faut-il parler aussi des milliers de jeunes boursiers africains qui viennent chaque année se former gratuitement en Algérie et dans les mêmes conditions que les étudiants algériens ? A-t-on oublié les centaines de Syriens – chassés par le désordre créé au Proche-Orient par les «printemps arabes» – venus s’établir en Algérie ?
A chaque fois que la nécessité se faisait sentir, l’Algérie a toujours fait preuve de grandeur et s’est acquittée, sans arrières pensées, de son devoir de solidarité envers les opprimés et les laissés-pour-compte. C’est, d’ailleurs, cette conduite irréprochable qui a permis à l’Algérie d’être respectée et écoutée dans le concert des nations, sans pour autant être une grande puissance. C’est la puissance de ses valeurs, de son idéal et de ses convictions qui font d’elle un grand pays.
C’est sans doute sur ces aspects que M. Ouyahia aurait dû insister lorsqu’il avait évoqué la nécessité de réguler les flux migratoires au Sahel en raison de l’importance du phénomène, et non faire dans l’improvisation à deux sous ou dans le discours xénophobe. Personne n’aurait crié au scandale s’il avait pris le problème par le bon bout. A un vrai défi, Ouyahia a présenté de mauvais arguments. Mais tout le monde le sait, la communication n’est plus le fort des responsables algériens.
S. S.
Comment (15)