L’allégeance à la France au menu de la présidentielle de 2019 ?

Bouteflika France
La campagne électorale pour la présidentielle a-t-elle déjà commencé ? New Press

Par Youcef Benzatat – La visite informelle qu’avait effectuée le Premier ministre, Abdelmadjid Tebboune, à son homologue français avait résonné comme une menace dangereuse pour le clan des oligarques. Celle-ci aurait sans doute été interprétée comme une manœuvre pour doubler Bouteflika dans son allégeance à la France pour s’assurer de son soutien en perspective de la présidentielle de 2019. Sachant que Tebboune ne pourrait être que le représentant du clan adverse, à savoir celui de l’état-major, qui voudrait bien balayer la scène publique avant l’échéance des présidentielles de 2019.

Depuis le début du bras de fer opposant Tebboune aux oligarques d’Alger et à leur tête le président du FCE, Ali Haddad, le président Abdelaziz Bouteflika est resté muet jusqu’à cette visite informelle de son Premier ministre à l’ancienne puissance coloniale, qui ne veut décidément pas lâcher sa proie d’hier.

Tebboune a beau préciser que c’est Bouteflika lui-même qui l’a autorisé à effectuer cette visite, l’intrigant traitement de cette affaire de visite mystérieuse par les médias des deux rives de la Méditerranée et les rumeurs qui s’en suivirent ont visiblement mis le feu aux poudres entre les deux clans rivaux qui se disputent la présidentielle de 2019. Même la télévision publique est restée muette à cette occasion.

C’est par le canal privé, réputé proche du clan présidentiel, Ennahar TV, ce mardi 8 août, que vraisemblablement Bouteflika, sentant le brûlé dans la maison, et où il a été pris de panique, a pris publiquement position dans ce conflit, en adressant une brutale remontrance au Premier ministre, affichant clairement sa position aux côtés des oligarques.

En fin manœuvrier, il a accusé Tebboune de comportement irresponsable, en l’accusant de «prendre des décisions anarchiques», d’exercer «un véritable harcèlement contre les opérateurs économiques», de faire pression sur les walis, sur les responsables des banques et de donner au monde «une image négative de l’Algérie», se gardant de ne faire aucune allusion à cette affaire de visite assassine. Qui aurait révélé au grand jour ses propres manœuvres contre l’opposition de Toufik, ancien patron du DRS à la retraite, pendant ses violations successives de la Constitution pour briguer les troisième et quatrième mandats, pour gagner le soutien des puissances étrangères ?

C’est un message codé dont la portée dépasse nos frontières. Il s’adresse, d’une part, aux puissances étrangères, en les mettant en garde sur «les harcèlements contre les opérateurs économiques» qui pourraient éventuellement nuire à leurs intérêts en Algérie. D’autre part, il s’adresse à l’administration pour l’inciter à ne pas déserter son clan, en accusant Tebboune de faire pression sur les walis et sur les responsables des banques. Sans oublier sa rhétorique populiste, dans laquelle il excelle, en prenant à témoin l’opinion nationale sur les dangers de l’anarchie dans laquelle le Premier ministre peut faire basculer le pays, en prenant des «décisions anarchiques» et en lui reprochant de présenter «une image négative de l’Algérie» pour titiller la fibre patriotique de la grande masse des Algériens.

Il est impossible d’imaginer autrement les dessous de cette affaire de visite controversée, suivie d’une telle réaction démesurée de la part du Président de la République. Car, si tel n’est pas le cas, Bouteflika aurait instruit son Premier ministre, comme à l’accoutumée, dans la gestion des affaires du sérail, loin de toute agitation et d’oreilles indiscrètes. Si cette affaire a pris une telle ampleur, c’est que la rivalité des deux clans, qui se disputent la présidentielle de 2019, a épuisé le jeu des alliances nationales pour déborder sur l’arbitrage international sous forme de rivalités dans l’allégeance aux puissances étrangères.

Y. B.

Comment (12)

    Nordesque
    15 août 2017 - 9 h 21 min

    Bien avant l’indépendance El Mali et son clan ont été couvés par le Maroc et la France, pour prendre leur revanche sur nos martyrs. On voit bien les dégâts incommensurables, aujourd’hui. Nos ennemis les plus farouches ne seraient pas arrivés à ce résultat! Faire d’un paradis avec toutes ses richesses, une décharge à ciel ouvert et un enfer pour sa jeunesse qui préfère servir de repas aux requins qu’aux rapaces de ce clan qui n’a rien d’algérien!

    MOMO
    14 août 2017 - 6 h 25 min

    Si une institution doit agir pour sauver le pays c’est maintenant et ce n’est pas en réhabilitant Tebboune qu’on sauvera l’Algérie.Sa gestion catastrophique des licences d’importation, avec l’application rétroactive de la Loi et blocage aux ports de biens payés en devises fortes pour les laisser pourrir ou rouiller, nous donnes un avant gout de son intelligence. Quant à son opération main propre, j’ai bien peur que, comme ouyahia, il s’attaque aux Bac+4 et plus, des zaoualia qui habitent des HLM pourri et roulent à pied ou en tacots, et laisse la maffia milliardaire express jouir de leur liberté de nuire.

    Cheikh kebab
    12 août 2017 - 20 h 42 min

    Et le président,pourquoi il ne se montre las,pourquoi il ne s’exprime pas en public? Pourquoi c ould Abbas qui jure sur ennahar que c bien Bouteflika qui a émis ce désaveu ??? Beaucoup de questions.

    Moh
    12 août 2017 - 11 h 29 min

    Seul Liamine Zeroual a été élu sans l’accord de la France, il a même refusé de recevoir son président à l’ONU.
    Un Général qui limitait les mandats présidentielles à deux mandats est un homme qui aimait son pays et son peuple.

    A3zrine
    11 août 2017 - 19 h 24 min

    Oui comme d’habitude l’avenir de l’Algérie se joue et se décide en France. À chaque échéance on voit un ballet de hauts dignitaires se déplacer pour discuter du comment doit être notre avenir et jamais comment sera notre développement.
    C’est en France aussi que se décide l’avenir de nos grandes fortunes qui commencent à occuper plus de place sur la scène politique et économique, comme par exemple Haddad qui risque plus ou moins de subir le même sort que Khalifa.
    Cette sortie de Tebboune et ces vacances, tout ça n’est pas anodin et surtout pas le fruit du hasard. Wait ans see, 2019 finira par nous le dire….

    MB
    10 août 2017 - 11 h 08 min

    Le virus a muté, il est devenu plus résistant que jamais. Impossible de ne pas voir qu’il devient de plus en plus envahissant, et aucune mesure préventive n’est possible, pour éradiquer le mal : la loi est depuis longtemps devenue poreuse, ce n’est plus un support sûr, tellement fragilisée par nos défaillances civilisationnelles. Alors, que faire? Peut être qu’ils ont raison de s’enrichir, par le moyen de la rente face à un peuple qui ne se pose plus de questions sur lui-même et sur son devenir. Nous sommes à deux pas du gouffre constitutionnel et institutionnel, y chuter c’est aller vers la disparition et l’effacement de notre mémoire. la révolution contre le colonialisme n’aurait été qu’une vaine tentative. Et le pacte avec les chouhadas trahi.

    Aidouni
    9 août 2017 - 11 h 06 min

    Monsieur Benzatat, supposons que vous ayez raison lorsque vous rapportez, qu’il y aurait un conflit entre l’entourage de Abdelaziz Bouteflika et l’État-Major. Permettez-moi de vous contredire ou de vous compléter sur quelques points :

    1. L’état-Major de l’ANP n’est pas un clan, mais le haut commandement de l’ANP. Vu le rôle que lui confère la constitution dans la préservation de la pérennité, la sécurité et la stabilité du pays, il est de devoir constitutionnel de cette INSTITUTION d’interférer lorsque le danger guette la nation.

    2. Les dernières semaines ont prouvé qu’il y a feu dans la demeure et que le commandant de bord de l’avion « ALGERIE » est totalement absent. Ce qui laissent beaucoup d’Algériens penser, que certains cercles gravitant autour de l’argent sale veulent s’accaparer le pouvoir au nom du président. C’est justement pour calmer les Algériens que le premier ministre TEBBOUNE est intervenu pour contrecarrer remettre en place le meneur de l’oligarchie.

    3. Les scènes irréalistes qui se sont déroulées lors de l’enterrement de Réda Malek (Allah yarhmou), où certains (dans le but de prouver au monde entier leur puissance supposée) se sont comportés indignement comme dans une kermesse et non à un enterrement d’un valeureux Moudjahid, ont dû alerter les derniers réticents au sein du commandement de l’ANP.

    4. Si l’ANP aurait décidé d’interférer dans le jeu politique comme vous l’insinuiez, cette interférence rentre bien dans le cadre de son rôle constitutionnel.

    5. Vous n’ignorez pas l’importance « religieuse » de la décision collective au sein du commandement de l’ANP. Jamais un chef (même Boumediene, Allah yarhmou) ne s’est jamais aventuré à prendre des décisions importantes individuellement. Les décisions importantes sont toujours le résultat d’un consensus murement réfléchit.
    6. Le voyage à Paris de TEBBOUNE, qui a été désigné par le Président et qui agit donc en son nom, pourrait rentrer dans le cadre de cette interférence, que le Haut Commandement de l’ANP voudrait expliquer au plus important partenaire de l’Algérie – à côté de la Russie –, en l’occurrence la France.

    7. Votre titre « L’allégeance à la France au menu de la présidentielle de 2019 ? » ne sied en aucun cas avec la réalité. Car s’il y a une institution en Algérie qui a toujours préservé une distance visible envers l’ancienne puissance coloniale, c’est bien l’ANP. Cette dernière n’a jamais fait allégeance à qui que ce soit. Mais seulement à la Patrie!

    8. La France connait le caractère républicain de l’ANP et sait que les intérêts français au Maghreb et au Sahel seront beaucoup mieux servis avec une Algérie stable, démocratique et économiquement fiable que par une Algérie fragilisée. Dans le stade actuel, l’urgence est la stabilité.

      zaatar
      10 août 2017 - 10 h 21 min

      Bonjour,
      Permettez moi de m’insérer dans ce débat ou échanges d’idées qui passionne ou pourrait passionner beaucoup de monde à tous les échelons. Ce que rapporte Mr Y. B et ce que vous rapportez en compléments nous incite à des conclusions, peut être un peu hâtives mais somme toute logique. Si l’on comprend bien, l’ANP, vu le rôle que lui confère la constitution dans la préservation de la pérennité, la sécurité et la stabilité du pays, il est d’un devoir constitutionnel de cette institution d’interférer lorsque le danger guette la nation. En outre, elle dispose de moyens de « puissance » pour contrecarrer ou à même de réduire à néant les « ennemis » de l’Algérie lorsque ces derniers apparaissent au grand jour et s’affichent en tant que tel. Bien. A partie de là, questions: Est ce que la situation actuel du pays n’est pas dramatique à l’égard de ce qu’endure le peuple et de ce qui est hypothéqué à l’avenir aux futurs générations? Les batailles pour le pouvoir entre clans, « visibles à l’œil nu » par tous (et donc par l’ANP) et qui risquent de conduire la pays au chaos sont considérés comme événements « politiques » normaux et ne dérangent outre mesure personne même l’ANP. La gestion catastrophique du pays, depuis l’indépendance à ce jour, a toujours été reconduite de facto par le même système au grand Dam de l’ANP (si l’on considère que cette dernière oeuvre pour le bien du pays). On peut disserter encore de beaucoup d’anomalies qui peuvent conduire le pays à des catastrophes et pour lesquelles l’ANP ne fait que les scruter des yeux sans pour autant y aller pour y mettre un terme. On en va tout de même pas me dire que l’ANP attend que le chaos s’installe pour intervenir, cette institution ayant pour rôle notamment d’assurer la stabilité du pays. Qu’on ne vienne pas me dire que l’ANP ne fait pas de politique, ce n’est pas de ça qu’il s’agit. Le titre de l’article d’ailleurs parle d’allégeance à un pays étranger pour la prochaine présidentielle. Il y a bien quelque chose qui m’échappe, je parle pour moi bien sur, sauf si je n’ai rien compris aux différents stratagèmes.

        Aidouni
        11 août 2017 - 11 h 01 min

        Bonjour!
        Comme vous et moi la très grande majorité des Algériens est très inquiète des développements qui se dessinent autour de l’horizon 2019 (bien qu’il ne soit pas exclu que cet horizon soit rapproché, en raison d’éventuels évènements qui peuvent surgir soudainement.

        Beaucoup d’Algériens se posent la question, pourquoi la Muette ne s’est pas exprimée (au sens d’agir) jusqu’à présent sur ces développement en général et sur les attaques que subit TEBBOUNE en particulier? Je pense qu’elle l’a déjà fait, mais sans pour autant user de la technique du « Bendir » et « Zarna ». Pour confirmation ou infirmation, attendons les déclaration à l’occasion du 20 Aout 1955 et la parution du prochain numéro d’El-Djeich.

          Anonyme
          11 août 2017 - 17 h 21 min

          Men femek le rabi

    Chaoui
    9 août 2017 - 8 h 45 min

    SIDÉRANT comment on se dirige doucement mais sûrement, par le fait d’irresponsables, vers de sombres lendemains. Et tout ceci par le fait des égos de quelques-uns et de leurs soifs de pouvoir ! Ils ne jouent pas avec leur vie mais avec celle de TOUTE la nation au risque de mettre notre Pays en danger comme jamais. L’Algérie ne serait-elle plus une République mais une…monarchie !

    Algeria
    9 août 2017 - 7 h 31 min

    Ce n’est pas l’Algérie Algérienne voulue par nos martyrs, mais c’est mieux que de faire allégeance à des dictatures incultes et rétrogrades du machrek.

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