Des anticolonialistes français veulent déboulonner le maréchal Bugeaud
Par Houari Achouri – Jeune Afrique a révélé que «des internautes français appellent à se défaire des statues et des plaques en l’honneur du maréchal Bugeaud et de revenir sur les non-dits du passé colonial français». Selon la même source «des journalistes du quotidien Sud-Ouest ont récemment vu en lui un «soldat laboureur et un homme politique visionnaire», mais sur Facebook, des internautes l’ont désigné comme une «grosse crapule», un «boucher en uniforme», un «criminel de guerre qui ne mérite ni statue ni rue à son nom en France».
C’est en 1841 que le général Thomas Robert Bugeaud a été nommé par Louis Philippe gouverneur général à Alger, avec pour mission d’occuper le pays. Il devint ainsi le plus haut représentant de la France en Algérie. Cette période a été marquée par toutes sortes de «dépassements» : massacres, déportations de populations, enlèvement de femmes et d’enfants utilisés comme otages et «politique de la terre brûlée». C’est à Bugeaud que les historiens français imputent tout cela. Pendant sept ans, il fut, au nom de «la France», font-ils remarquer, le maître à peu près absolu de l’Algérie.
Robert Louzon, militant anticolonialiste, auteur du livre Cent ans de capitalisme en Algérie publié en 1930, rappelle que «le gouverneur général Bugeaud, duc d’Isly, avait envoyé, en juin 1945 à Pélissier, l’ordre suivant: ‘Si ces gredins (les Algériens) se retirent dans leurs cavernes, imitez Cavaignac aux Sbéhas ! Fumez-les à outrance comme des renards’». Robert Louzon précise que, «l’année précédente, Cavaignac, futur gouverneur général de la République en Algérie, futur emprisonné du 2 décembre, avait, lui aussi, enfumé «comme des renards» des Sbéhas réfugiés dans des grottes». Il ajoute : « Et deux mois après Pélissier, le 12 août 1845, Saint-Arnaud, à son tour, près de Ténès, il transformait d’autres grottes en ‘un vaste cimetière’ où 500 ‘brigands’ furent enterrés».
Le terme «enfumades» est systématiquement associé au nom du général Bugeaud. Ce fut, en fait, sa doctrine. La politique de la terre brûlée qu’il a décidée et mise en œuvre, a eu, aux dires des historiens français, «des effets dévastateurs sur les équilibres socioéconomiques et alimentaires du pays».
Quand les informations sur les «enfumades» des grottes du Dahra parviennent à Paris, c’est l’indignation dans certains milieux anticolonialistes, qui font une interpellation au général Bugeaud. Celui-ci en assume la responsabilité et répond : «Et moi, je considère que le respect des règles humanitaires fera que la guerre en Afrique risque de se prolonger indéfiniment.» Sur le terrain également, les méthodes de «pacification» préconisées par Bugeaud et appliquées avec zèle par certains de ses subordonnés ne font toutefois pas l’unanimité. Mais Bugeaud qui, en sa qualité de gouverneur général de l’Algérie, était à la tête du corps expéditionnaire, justifia toutes les exactions commises par les troupes françaises. Pour lui, «il n’y a pas d’autre moyen d’atteindre et de soumettre ce peuple extraordinaire».
Avec un tel palmarès macabre qui déshonore la France, il est parfaitement compréhensible que des internautes français veuillent déboulonner le général Bugeaud, symbole de la barbarie coloniale en Algérie.
H. A.
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