Rachid Boudjedra règle leurs comptes aux «imposteurs outre-Méditerranée»
Par R. Mahmoudi – Après une série de polémiques dont il a été tour à tour l’acteur et l’objet, Rachid Boudjedra revient cette année avec deux essais et un roman.
Dans un entretien au quotidien libanais Al-Akhbar, paru ce mardi, Rachid Boudjedra annonce un deuxième pamphlet, dont la sortie est prévue au début de l’année prochaine à Paris, dans lequel il réglera leurs comptes aux imposteurs «outre-Méditerranée» qui, comme Bernard-Henri Levy, Pascal Bruckner et Alain Finkielkraut, «manipulent» et «provoquent des guerres». L’auteur a choisi un titre évocateur : L’Occident aveugle, qui se veut comme un procès de cette élite occidentale aveuglée par ses accointances avec l’«establishment».
L’auteur de Répudiation révèle dans la même interview au journal libanais la parution, en octobre prochain, d’un nouveau roman qui ne s’éloigne pas de l’histoire, et ayant pour titre La Dépossession. Boudjedra y dépeint un incident : la destruction de l’atelier du peintre Albert Marquis, en pleine Guerre de libération nationale, comme une métaphore d’un pays «mutilé par la colonisation». L’auteur bifurque dans ce roman sur un autre événement tragique : l’assassinat, en 1970, de Krim Belkacem, un des pères de la Révolution du 1er Novembre.
Après avoir été attaqué, et même menacé, a-t-il révélé, par un membre de la famille du chef des négociateurs d’Evian à la sortie de son roman Figuier de barbarie (Grasset, 2010), dans lequel il évoquait succinctement l’implication de Krim Belkacem, avec les deux autres «B» (Bentobal et Boussouf), dans l’élimination précoce d’un autre chef de la Révolution, Abane Ramdane, il entreprend de retracer ce «parricide» annonciateur des drames à venir.
Il s’appuie dans son enquête sur les révélations que lui avait faites une cousine qui est en même temps ancienne moudjahida, quelques jours avant sa mort. «Elle avait vingt ans, raconte Boudjedra lorsqu’elle est sortie de l’école des infirmières à Akbou (Kabylie) et a rejoint la Révolution là-bas, sous le commandement du colonel Amirouche. Quand l’étau s’est resserré sur les combattants dans la région, Amirouche décida de l’envoyer en Tunisie.
Une fois en Tunisie, elle fit la connaissance de Krim Belkacem en 1957 et gagna vite sa confiance. Celui-ci la considérait, d’ailleurs, comme sa fille. C’est cette confiance que vont exploiter les services de Boumediène pour arriver jusqu’à Krim Belkacem, en dépit de la forte protection dont il bénéficiait autour de la suite qu’il prenait dans un hôtel à Francfort. Exploitant cette confiance indéfectible entre elle et Krim, les visiteurs de l’aube lui ont demandé de passer la nuit chez lui. Dès que ses gardes et collaborateurs se sont endormis, elle a ouvert discrètement la porte. Les tueurs s’y sont introduits et ont tué Krim par strangulation». Avec ce livre, Boudjedra doit affronter une pluie de réactions.
R. M.
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