Boniface : «Une frappe en Corée conduira à une IIIe guerre mondiale»
Par Sadek Sahraoui – La Corée du Nord a annoncé ce dimanche matin avoir testé, quelques heures plus tôt, une bombe à hydrogène, dite bombe H. Cette charge serait destinée à être montée sur un missile balistique intercontinental. Le régime qualifie ce test de «réussite totale». Pékin, Moscou, Tokyo, Séoul et Paris n’ont pas tardé à condamner cette nouvelle violation de multiples résolutions de l’ONU exigeant la fin des programmes nucléaire et balistique nord-coréens.
Cet essai nucléaire, le sixième mené par le régime nord-coréen depuis 2006, a été ordonné par le dirigeant Kim Jong-un peu après l’annonce officielle que Pyongyang était parvenu à développer une nouvelle arme dotée d’une «grande capacité destructrice», a précisé la télévision nord-coréenne. Kim Jong-un s’est rendu ce dimanche à l’Institut des armes nucléaires où il a «observé une bombe H destinée à être chargée dans le nouveau missile intercontinental», a rapporté l’agence de presse officielle nord-coréenne KCNA, qui a ajouté que la bombe «d’une puissance sans précédent» marque «une occasion très importante, le fait d’atteindre le but final qui est de parachever la force nucléaire de l’Etat».
L’essai en question a provoqué un séisme d’une magnitude de 6,3 près du principal site nord-coréen d’essais nucléaires, à Punggye-Ri, dans le nord-est, enregistré à 11h30 (dans la nuit de samedi à dimanche, à Paris) par différents instituts géologiques américain, sud-coréen et japonais. «L’échelle de l’énergie (dégagée) était de cinq à six fois plus puissante que lors du cinquième essai nucléaire», a déclaré à la télévision Lee Mi-sun, qui dirige l’Administration météorologique sud-coréenne.
Selon les premières estimations d’experts, cet essai serait près de dix fois plus puissant que les précédents. Cette puissance indiquerait que l’essai concernerait effectivement une bombe H. La cinquième explosion en septembre 2016 avait provoqué un séisme de 5,3 de magnitude et dégagé une énergie de 10 kilotonnes, c’est-à-dire moins que la bombe qui avait détruit Hiroshima (15 kilotonnes). Le séisme a été ressenti dans des régions frontalières du nord-est de la Chine, ont rapporté des médias officiels chinois et des internautes locaux. La secousse tellurique a été ressentie pendant «environ huit secondes» dans plusieurs localités de la province chinoise de Jilin, a indiqué la télévision d’Etat CCTV.
Les bombes H sont beaucoup plus puissantes que les bombes atomiques ordinaires. Les premières estimations des experts quant à la puissance de l’engin testé ce dimanche varient profondément, certains évoquant une bombe d’un mégatonne. Quelle que soit la puissance de la déflagration, Jeffrey Lewis du site «armscontrolwonk.com» a estimé qu’il s’agissait d’une arme thermonucléaire, ce qui constitue un progrès notoire dans les programmes nucléaire et balistique nord-coréens.
La bombe testée dimanche pourrait être montée sur le nouveau missile balistique intercontinental (ICBM) que la Corée du Nord affirme avoir mis au point. Cette dernière a procédé à deux essais réussis d’un missile balistique intercontinental ou ICBM, le Hwasong-14, en juillet, dont la portée d’environ 10 000 km place le territoire américain sous la menace théorique d’une frappe nucléaire nord-coréenne.
Cette nouvelle initiative du régime de Kim Jong-un pose un défi direct au président américain Donald Trump, qui s’était entretenu quelques heures auparavant au téléphone avec le Premier ministre japonais, Shinzo Abe, de la crise dans la péninsule coréenne.
En juillet, le président américain Donald Trump a prévenu qu’il ferait tomber sur la Corée du Nord «le feu et la colère» si Pyongyang continuait à proférer des menaces contre les Etats-Unis et leurs alliés. Dans un commentaire publié ce matin sur sa page Facebook, le directeur de l’Institut français de relations internationales et stratégiques (Iris), Pascal Boniface, a estimé que «la Corée du Nord ne renoncera jamais à l’arme nucléaire parce que Kim Jong-un ne veut pas finir comme Saddam Hussein ou Kadhafi», ajoutant qu’«une solution militaire n’est pas envisageable, car elle pourrait déboucher sur une troisième guerre mondiale». «Les déclarations incendiaires de Trump n’y changent rien», a soutenu M. Boniface, qui soutient que seule la négociation pourrait aider à résoudre la crise de la péninsule coréenne.
S. S.
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