Stratégie ou maladresse ?
Par Saadeddine Kouidri – Il a été dégommé pour avoir voulu gérer les importations ou pour avoir manqué de respect au patron des patrons. Qu’importe. Ni la mort, ni les émeutes, ni les vols, ni les scandales en cascade n’ont jamais ébranlé un haut gradé de l’administration, encore moins un ministre de la République et jamais il ne serait venu à l’idée du citoyen algérien le licenciement d’un Premier ministre après deux mois d’exercice. Si le Premier ministre a été écarté, c’est à croire que l’une ou l’autre de ses deux décisions ou les deux à la fois risquaient de mettre à mal l’événement le plus important en perspective dans le sérail : la désignation de la candidature à l’élection présidentielle de 2019, où le cinquième mandat n’est toujours pas encore définitivement écarté.
La société bourgeoise est l’organisation historique de la production la plus développée et la plus variée qui soit, dixit Karl Marx. Elle est aussi une organisation basée sur l’exploitation de l’homme par l’homme. Quand on situe le conflit en Algérie entre la bourgeoisie de l’Etat et la bourgeoisie privée, on n’est pas loin de laisser entendre que l’Algérie est dominée par la bourgeoisie !
Les peuples ont de tout temps espéré sortir de l’assujettissement et plaçaient leur espoir dans le socialisme. Ce socialisme qui s’est concrétisé pour la première fois dans le monde par la révolution d’Octobre en 1917. Cette révolution a fini par échouer comme avait échoué la révolte de Spartacus contre l’esclavagisme qui, aujourd’hui, est vaincu définitivement malgré certaines traces qui persistent, dit-on, en Mauritanie. A l’instar de l’esclavagisme, le capitalisme sera vaincu un jour, mais en attendant, à quoi tient cet espoir ?
Si le capitalisme est dirigé par la bourgeoisie dans les pays occidentaux, il est dirigé par le Parti communiste en Chine. Cette alternative au pouvoir de la bourgeoisie laisse entrevoir d’autres possibilités dans le capitalisme avant sa péremption.
Nous savons tous que notre pays ne produit pas assez puisqu’il importe plus de la moitié de sa consommation et que les hydrocarbures sont sa principale exportation. Ces deux facteurs à eux seuls suffisent à dire que nous ne sommes pas une société bourgeoise. Si en sus on colle à l’Etat actuel l’économie dirigée pour la distinguer de l’économie de marché qu’on attribue au privé, il suffit pour en douter de dire que l’économie de marché ne relève pas de l’économie mais du politique, et l’exemple de la Chine peut l’étayer.
Affirmer que le conflit serait entre l’Etat et l’argent, comme le fit M. Tebboune, ou écrire que le conflit serait entre la bourgeoisie de l’Etat et la bourgeoisie privée risque de cacher l’essentiel, qui est la contradiction entre la rente et le travail – la rente qu’elle soit privée ou publique et le travail qu’il soit privé ou public – elle installe le conflit à tous les niveaux, y compris dans l’économie informelle.
Lors de la résistance au terrorisme intégriste, on parlait de la famille qui avance et de la famille qui recule. Aujourd’hui, la distinction est entre ceux qui vivent de leur travail et de ceux qui vivent de la rente, sans distinction entre public et privé. Le public peut être adossé à la rente comme le privé peut être adossé au travail et inversement.
L’économie de marché à dimension sociale de M. Ouyahia est un autre leurre destiné à masquer la masse de devises versées par l’Etat aux importateurs et autres marchands, au moment où la misère s’installe de plus en plus et particulièrement dans la paysannerie. Cette situation que nous rapportent les médias est largement illustrée au quotidien par ces mendiants – la honte – que nous croisons tous les jours. Le dénuement des populations dans certaines régions indique l’absence de l’Etat malgré des subventions dont le montant, nous dit-on, s’élève à 30% du PIB. Les subventions, qui bénéficient à tous, ne parviennent pas aux plus démunis. Cet échec est le constat général. Il serait donc plus judicieux, dans le cas de la subvention de l’électricité et du gaz, par exemple, de rendre la consommation de la première tranche gratuite et d’augmenter les prix des autres tranches jusqu’à réduire en quelques années la subvention à zéro dans ce domaine. Un autre exemple concerne la subvention du lait : il s’agit de révéler au grand public la découverte scientifique qui affirme que si le lait est bon pour les nourrissons et les adolescents, il est néfaste pour les adultes. L’information pourrait entraîner la baisse de la consommation…
La généralisation de l’éducation reste notre lien à la Révolution et c’est la raison qui fait le plus peur aux intégristes et autres néocolonisés qui activent pour la rendre caduque. Elle permet à la majorité de nos enfants ne serait-ce que l’ouverture à la culture universelle que l’internet met à leur disposition. L’internet, ce nouvel acquis de l’humanité, permet une autre alternative : l’éducation sans limite, ouverte sur l’universel, qui permet de rester fidèle à sa classe, à son milieu. Oui, car il ne s’agit pas d’éduquer seulement, mais aussi de se préserver. La bourgeoisie détourne les meilleurs élèves en commençant par les pourvoir de cette liberté individuelle jusqu’à les happer, comme si la liberté individuelle était exclusivement bourgeoise. L’internet, grâce à son universalisme, contribue à mettre à nu crescendo ce kidnapping des meilleurs de nos jeunes, tout en cultivant cette précieuse liberté individuelle qui rend la vie vivante, une véritable ennemie du terrorisme islamiste.
A l’aide de la Toile, les bons élèves – de plus en plus nombreux – s’inscrivent y compris dans les universités étrangères et cherchent donc à parfaire leur savoir en Occident et «jusqu’en Chine» ! Ces jeunes ne peuvent être qu’à l’image de ses deux courageux policiers : Tayeb Aïssani et Alouaoui Saâd, natifs de Dhayet Etterfas, un ex-village socialiste, tués par le terrorisme ce jeudi 31 août 2017 devant le siège de la sûreté de Tiaret, à la veille de l’Aïd. Ils sont morts en mettant en échec l’Etat islamiste et pour préserver la vie en Algérie
S. K.
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