Crime contre l’humanité en Birmanie : silence, on massacre les Rohingyas !
Par Arezki Hatem – Combien de minorités ethniques et religieuses subissant une véritable épuration ethnique en ces temps où la théorie raciale se décline sous des atours rutilants de tromperie, qui trompent l’œil jusqu’à la racine de ce fabuleux organe de vision ? De Gaza – cette prison à ciel ouvert où une population palestinienne est réduite à survivre sur une ténue bande de terre où la densité humaine en mètre carré est la plus élevée au monde, où le taux de mortalité enfantine caracole sur l’échelle lestée par tant de privations que subit, chaque jour que Dieu fait, la population de cet îlot de résistance – jusqu’à aux confins les plus reculés de l’Afrique, de l’Asie, des Amériques et même en Europe, ce vieux continent où le respect des droits de l’homme est hissé en dignité sacerdotale !
Mais ce que subissent les Rohingyas en Birmanie dépasse l’entendement et n’a rien à envier aux atrocités commises à l’encontre de l’ethnie Herero, en Namibie, par le colonisateur allemand. Un autre génocide qui a été longtemps réduit au silence et dont la reconnaissance par l’Allemagne ne fut que tardive. Le grand écrivain algérien Anouar Benmalek, dans son dernier opus Le Fils du Shéol, a consacré un large pan de son intrigue romanesque au martyre des Héréros de Namibie, dans un profond et sincère travail mémoriel.
L’origine d’une minorité musulmane Rohingya dans un Etat à majorité bouddhiste est inscrite dans l’histoire. Ils seraient les descendants lointains de commerçants bengalis ; ils se seraient convertis à l’islam au XVe siècle par l’intermédiaire des Routes de la soie. A l’époque, la région était un Etat vassal du Bengale. Ils sont répartis comme suit : 800 000 en Birmanie (Etat d’Arakan), 300 000 au Bangladesh, 24 000 en Malaisie, formant ainsi une population de 1 424 000 âmes.
Pourquoi tant de haine vis-à-vis des Rohingyas ?
De ces trois Etats où vivent des Rohingyas, la Birmanie est de loin le pays où leur présence constitue une forte minorité. Ils vivent sur une terre fertile, exploitant son sol arable dans une agriculture diversifiée ; d’aucuns pensent qu’au-delà de la haine raciale et religieuse vis -à vis des Rohingyas, une dessein sordide dont la visée pressante est de pousser cette minorité musulmane birmane à l’exode et de surcroît d’accaparer leur terre fertile.
Néanmoins, la volonté criminelle des autorités birmanes à éradiquer de son sol cette minorité remonte à la première prise du pouvoir par la junte militaire, aidée dans cela par des bonzes bouddhistes extrémistes, sinon par la haute autorité religieuse bouddhiste. C’est ce qui explique d’ailleurs le silence sidéral du Dalaï-lama, l’une des autorités les plus prestigieuses des adorateurs de Bouddha.
De fait, le pays birman est pluriethnique. En 1982, le pouvoir militaire avait promulgué une loi sur la nationalité qui comprend 132 ethnies. Celles-ci sont considérées comme birmanes «car elles appartiennent aux « races nationales » – c’est-à-dire à celles qui étaient présentes sur le territoire avant 1823, date de l’arrivée des colons britanniques», rapporte la journaliste Warda Mohamed dans Le Monde Diplomatique. Exit les Rohingyas, ainsi réduits à des parias, sur lesquels le châtiment de la mort est perçu, par la majorité bouddhiste, comme une bienveillance divine !
Quand une prix Nobel de la paix se fait apologiste du génocide
A méditer sur la position prise publiquement sur la lauréate birmane du prix Nobel de la paix, elle qui fut longtemps persécutée par le régime dictatorial de son pays.
Comment une femme politique qui a été jetée dans les geôles par la junte militaire birmane, torturée, privée de son foyer, de son mari, de ses enfants et de sa liberté, peut-elle non seulement se taire devant un viol caractérisé de la vie humaine, mais aussi se hisser en apologiste de la haine raciale ? Le point de basculement se porte comme une médaille tachée du sang des Rohingyas sur l’habit de cette Nobel de la paix, dont l’histoire retiendra que le mot paix qu’elle prononce de sa voix raffinée n’est qu’un chant de palinodie synonyme de versatilité.
A. H.
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