Ouyahia se prépare-t-il à réhabiliter la loi Khelil sur les hydrocarbures ?
Par Ramdane Yacine – En insistant sur la nécessité de réviser la loi sur les hydrocarbures, Ahmed Ouyahia prépare-t-il l’opinion publique à un retour à l’option mise sur la table par l’ancien ministre de l’Energie Chakib Khelil et rejetée parce qu’elle «porte atteinte à la souveraineté nationale» ? Le Premier ministre a tout l’air d’insinuer cela. «Une révision de la loi sur les hydrocarbures est nécessaire pour attirer de nouveaux investisseurs et améliorer les recettes financières du pays», a-t-il estimé.
La loi sur les hydrocarbures de 2001, d’inspiration américaine, avait été mise en place par Chakib Khelil. Son entrée en vigueur avait provoqué une levée de boucliers de la partie de son propre gouvernement, de la société civile, de syndicats et de partis politiques qui y voyaient un prélude au bradage des ressources pétrolières du pays au profit des compagnies étrangères. En fait, la loi de 2001 mettait les richesses du sous-sol du pays entre les mains des Américains.
En 2006, par un vent de lucidité, la loi en question a fait l’objet d’une révision sur ordre du président Bouteflika. Cependant, Chakib Khelil, toujours en poste, y avait introduit une taxe dénommée Taxe sur les profits exceptionnels (TPE). Si cette taxe n’est pas une invention algérienne et que des pays producteurs comme les Etats-Unis l’ont appliquée dès 1983, et qu’elle s’applique aux profits exceptionnels générés sans investissements supplémentaires, comme dans le cas de la flambée des prix de l’or noir, son application avec effet rétroactif avait fini par monter les compagnies pétrolières internationales contre l’Algérie.
Néanmoins, des experts avisés suggèrent que cette taxe avait été introduite subrepticement par Chakib Khelil, non pas dans le but de renflouer les caisses de l’Etat algérien en cas de superprofits – ce qui aurait été très logique et légitime – mais pour, finalement, s’en servir comme d’un repoussoir contre les compagnies étrangères et amener le gouvernement à revenir à la case de départ, c’est-à-dire à sa loi de 2001.
Dans l’amendement à la loi de Chakib Khelil, le législateur avait, rappelons-le, introduit le principe de préemption sur toute découverte ou cession d’actifs d’une compagnie étrangère au profit de Sonatrach. Ce principe risque donc fort de partir en pertes et profits au motif que l’ouverture grande du secteur aux étrangers et l’abandon de la règle 51/49 dans l’investissement pétrolier et gazier introduite dans la loi de finances complémentaire (LFC) de 2009 seraient la seule manière de faire cesser les procès qui pleuvent sur l’Algérie de la part des compagnies étrangères qui l’accusent d’abuser avec sa TPE. Total et Repsol et, avant eux, Anadarko et Maersk avaient engagé des actions en justice contre l’Algérie et obtenu gain de cause.
En plaidant pour la révision de la loi de 2006, Ouyahia voulait-il signifier ainsi que ce texte aurait découragé les compagnies étrangères à investir en Algérie ? Les jours à venir nous le diront. Mais il convient de faire observer que les avis d’appels d’offres internationaux dans le secteur brillent par leur infructuosité.
Ouyahia réussira-t-il à faire avaler la pilule cette fois-ci ? Chakib Khelil s’enorgueillirait, alors, d’avoir eu raison sur toute la ligne, lui qui n’a pas cessé d’affirmer que ses choix visaient à éviter au pays la situation de crise dans laquelle il patauge actuellement.
R. Y.
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