L’agence de presse officielle française vole au secours du roi prédateur
Par Houari Achouri – La très officielle agence de presse française AFP vole au secours du palais royal marocain ! Elle valide, les yeux fermés, une information sur des rapports d’audit officiels, présentés comme s’ils étaient rédigés par des enquêteurs indépendants, à propos du projet de développement d’Al-Hoceïma portant sur 2015-2019 et doté d’une enveloppe de 600 millions d’euros, qui avait été annoncé par le Makhzen dans le but de ramener le calme dans cette région du Rif marocain où les manifestations populaires de contestation sont incessantes depuis des mois.
Les auteurs de ces rapports ne sont autres que des fonctionnaires des ministères de l’Intérieur et des Finances ; comment peuvent-ils conclure autrement qu’en excluant toute «malversation» ou «fraude» et en évoquant seulement un «retard» et une «non-exécution» de ce programme, sans aller plus loin, c’est-à-dire déterminer les causes qui ont conduit à cette situation ? Mais ce ne sont tout de même pas eux qui vont dire à leur roi que ses fonctionnaires s’en mettent plein les poches en privant les habitants du Rif de tout progrès social !
Pourtant, émettre un doute sur la crédibilité d’une information officielle n’est pas excessif quand il s’agit d’une enquête sur la corruption dans un pays comme le Maroc où, selon les médias locaux eux-mêmes, des brigadiers de police reçoivent des sommes d’argent de la part de conducteurs ayant commis des infractions au code de la route pour leur éviter l’application de la loi.
Il est vrai que le Makhzen fait tout pour maintenir l’opacité sur ce qui se passe à El-Hoceïma. Il y a quelques jours, Saeed Kamali Dehghan, journaliste pour le quotidien britannique The Guardian, a été expulsé de cette ville par les autorités marocaines. Il s’était entretenu avec des animateurs de la contestation populaire dans le cadre d’un reportage sur le Hirak. Avant lui, d’autres journalistes étrangers qui couvraient ces événements ont été expulsés par les autorités marocaines parce qu’ils étaient susceptibles de rapporter les faits tels qu’ils sont.
Par contre, il y a des médias français qui observent un black-out total sur cette région malgré la persistance des manifestations dont la durée va bientôt boucler une année. On comprend leur comportement quand on sait que les patrons de ces médias ont soit des intérêts colossaux au Maroc, soit des liens affectifs dus à leurs origines. Alors, ils choisissent de passer sous silence un mouvement dont la mort, le 28 octobre 2016 à Al-Hoceïma, du poissonnier Mohcine Fikri, broyé dans une benne à ordures alors qu’il tentait d’empêcher la destruction de sa marchandise saisie par la police, n’a été que l’élément déclencheur. En fait, il couvait depuis de longues années. Aux revendications sociales légitimes de la population du Rif, marginalisée et plongée dans la misère, le Makhzen a toujours répondu par le mépris en combinant la répression et la propagande.
Aujourd’hui, la situation reste tendue dans l’ambiance sécuritaire créée dans le Rif par la répression féroce qui a conduit à l’incarcération de 350 à 400 personnes dans les prisons de Casablanca, Fès, Taza, Nador, Taourirt, Al-Hoceïma. Des peines allant d’une à vingt années de prison ont été prononcée en août dernier contre neuf d’entre eux. Mais la répression n’a pas réussi à briser les détenus rifains de la prison d’Oukacha, à Casablanca, qui ont entamé une grève de la faim pour exiger la libération de tous les prisonniers du Hirak.
H. A.
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