Le message des musulmans laïcs de France aux médias français
Par Houari Achouri – Dans une tribune publiée dans Libération du 12 octobre 2017 sous le titre «Nous, musulmans laïcs…», Nasser Ramdane Ferradj, fondateur du Collectif des musulmans progressistes et laïques, ex-maire adjoint et secrétaire de la section PS de Noisy-le-Sec (Seine-Saint-Denis) et ex-vice-président de SOS Racisme, interpelle les médias français et leurs journalistes, à gauche notamment, auxquels il reproche de privilégier «des organisations communautaristes comme le Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF)» qu’il décrit comme une «fausse association antiraciste» et comme un «groupe politico-religieux sectaire répercutant de plus ou moins loin les idées des Frères musulmans», derrière «le masque d’un communautarisme victimaire et agressif».
Nasser Ramdane Ferradj reproche également à ces médias de donner «la vedette au Parti des indigènes de la République (PIR), groupuscule identitaire» et rappelle que son animatrice, Houria Bouteldja, a publié un brûlot intitulé «Les Blancs, les juifs et nous». Ce n’est pas tout. Parmi ceux qui ont l’honneur des micros et studios, il cite ce qu’il appelle des «associations régressives» et en donne un exemple, «Lallab, qui se présente comme féministe mais fait campagne pour l’abrogation de la loi de 2004, c’est-à-dire pour le voile islamiste à l’école, et invite comme modèles à suivre des femmes comme cette députée tunisienne du parti Ennahdha ayant œuvré pour que la Constitution déclare la femme « complémentaire » de l’homme, ce qui revient à lui assigner un rôle second».
Il trouve que «ce type de journalisme épouse la stratégie de l’islam politique jusqu’à en devenir pièce maîtresse pour son enracinement en France». Il met en cause «une jeune génération de journalistes désormais persuadés que toute critique de l’islam ou mise en cause des extrémistes de notre religion sont des attaques racistes contre tous les musulmans». Il explique que «dans l’islam que nous pratiquons, la critique est libre et le débat démocratique essentiel. Notre religion nous est intime : nous n’avons rien à faire des organisations qui militent pour que ce soit l’islam qui gère nos vies d’Arabo-berbères et de banlieusards en France».
Il s’interroge sur ce traitement qui est infligé par ces médias aux musulmans laïques et progressistes, ceux de la générosité et de l’ouverture au monde, alors, explique-t-il, qu’ils «croient aux valeurs universelles qui ont été transmises par nos familles et par l’école : l’égalité, la liberté, la fraternité». Il en donne la raison : «Nous refusons de nous laisser embrigader par ces journalistes dans des visions obscurantistes de nos cultures et religion.»
Pour l’ex-vice-président de SOS Racisme, «ce n’est pas combattre l’extrême droite que de favoriser les intégristes musulmans, ni lutter contre l’intolérance que de revendiquer l’abrogation des lois qui proscrivent les signes religieux à l’école, qui interdisent de circuler le visage caché sur la voie publique». Il interpelle de nouveau ces journalistes travaillant sur les questions de racisme, de religion et de vivre-ensemble dont il dit être en droit d’attendre qu’ils sachent «reconnaître l’extrême droite, quel qu’en soit le visage». «N’essayez pas, leur dit-il, de faire passer l’islamisme pour une force de progrès, vous vous livreriez à un jeu mortifère. Pour nous, musulmans laïques, il ne s’agit pas d’un jeu. Il s’agit de nos vies et de nos libertés», conclut-il.
H. A.
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