Maroc : le procès des militants du mouvement de contestation du Rif à nouveau ajourné
Le procès des militants du mouvement de contestation dans la région du Rif, au nord du Maroc, a été une nouvelle fois ajourné mardi par la justice marocaine, alors que leurs soutiens qui ont organisé un sit-in pour dénoncer leurs conditions de détention et réclamer leur libération s’inquiètent pour leur santé.
Un des prévenus qui comparaissait devant la cour d’appel de Casablanca avec 20 autres militants et sympathisants du Hirak s’est évanoui dans la salle d’audience et a été évacué en ambulance, selon l’AFP. Dans une ambiance houleuse, marquée par de vifs échanges entre les avocats, la cour venait de décider d’ajourner l’audience au 24 octobre. C’est le troisième report des débats. «Ce procès prend beaucoup de temps et va créer une situation de tension, de malaise (…). Nous n’avons pas besoin de ça», a déclaré un des avocats de la défense, Mohammed Ziane, cité par la même source.
Les 21 accusés, âgés d’une vingtaine d’années pour la plupart, ont été arrêtés entre fin mai et juin à Al-Hoceïma (nord), épicentre du mouvement de contestation, et transférés à la prison Oukacha, à Casablanca. Poursuivis pour «atteinte à la sécurité intérieure de l’Etat», «tentatives de sabotage, de meurtre et de pillage» ou «conspiration contre la sécurité intérieure», ils risquent jusqu’à 20 ans de prison. Douze d’entre eux suivent une grève de la faim depuis près d’un mois, et leur état de santé suscite de vives inquiétudes chez les associations de défense des droits de l’Homme, qui appellent à leur libération.
Lors de la précédente audience, début octobre, les avocats de la défense avaient déposé une demande de liberté provisoire ou, à défaut, une hospitalisation des grévistes de la faim, sans résultat. Aux abords du tribunal, plusieurs militants ont organisé un sit-in pour dénoncer leurs conditions de détention et réclamer leur libération. Récemment, l’ONG EuroMed Droits a appelé les autorités marocaines à «libérer toutes les personnes arbitrairement détenues» suite au mouvement de contestation du Rif et à «abandonner» les charges retenues contre elles, regrettant «la réaction sécuritaire des autorités marocaines qui se sont engagées sur la voie de la répression».
«Il est impératif que les autorités marocaines respectent les droits des prisonniers, veillent à leur santé, à leur intégrité physique et psychologique», a ajouté l’ONG, rappelant que «le Maroc a ratifié la Convention contre la torture des Nations unies et l’administration pénitentiaire est tenue de respecter le droit international en assurant, entre autres, à ses détenus l’accès à des procédures juridiques leur permettant de contester leur détention et leur traitement, et leur permettre de communiquer sans entrave avec leur famille et leurs avocats.»
Depuis plus de deux semaines, de nombreux détenus du mouvement de contestation Hirak ont entamé une grève de la faim pour dénoncer le caractère arbitraire de leur procès et les conditions de leur détention. La même cour de Casablanca doit se pencher mardi sur une autre affaire liée à la contestation populaire née après la mort tragique de Mouhcine Fikri, vendeur de poissons broyé par une benne à ordures alors qu’il cherchait à récupérer sa marchandise confisquée par la police fin octobre 2016 à Al-Hoceïma. Déjà condamné à un an de prison ferme pour avoir «appelé à prendre part à une manifestation interdite», le 20 juillet à Al-Hoceïma, le journaliste et directeur du site d’information Badil, Hamid El-Mahdaoui, doit comparaitre pour «manquements à son obligation de porter à la connaissance des autorités une tentative de nuire à la sécurité intérieure de l’Etat». La date du procès du leader du mouvement, Nasser Zefzafi, n’est elle pas encore connue.
R. I.
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