Rajoy va asphyxier financièrement la Catalogne
Madrid s’apprête à prendre le contrôle total des finances de la Catalogne, déjà mises sous tutelle partielle, ce qui laisserait sans aucunes ressources le gouvernement catalan et priverait ses dirigeants de leurs salaires. Samedi, le gouvernement de Mariano Rajoy a annoncé qu’il comptait mettre la main sur les «recettes» perçues directement par le gouvernement catalan. Composées de certains impôts (patrimoine, succession) et des frais d’inscription dans les universités, ces recettes représentent environ un quart des revenus de l’Exécutif catalan. Si le Sénat – où les conservateurs de M. Rajoy ont la majorité absolue – vote vendredi les mesures demandées par le gouvernement, la Direction générale des impôts de Catalogne devra faire contresigner toutes ses décisions par le ministère espagnol du Budget, et non plus par l’actuel n°2 catalan, Oriol Junqueras.
La Generalitat (Exécutif catalan) n’aura donc plus aucune marge de manœuvre financière, car Madrid a déjà la main sur le reste de ses ressources financières. Le gouvernement espagnol avait décidé dès la mi-septembre de court-circuiter financièrement le gouvernement régional catalan afin d’éviter que ses dirigeants n’utilisent l’argent public pour organiser le référendum d’autodétermination du 1er octobre, par exemple, pour acheter des urnes. En temps normal, l’Etat espagnol lève lui-même la majeure partie des impôts (sauf au Pays Basque et en Navarre, autonomes sur ce point), puis les répartit entre les différentes régions, qui paient ensuite les fonctionnaires, les services sociaux, éducatifs, etc. Depuis le 15 septembre, Madrid ne verse plus cet argent sur le compte du gouvernement catalan, mais paie directement les factures des services publics «essentiels» de Catalogne (hôpitaux, écoles, police, etc.), ainsi que les salaires des fonctionnaires.
Le gouvernement avait pris cette mesure-choc après le refus des séparatistes de se soumettre au contrôle hebdomadaire des dépenses qui leur était imposé depuis juillet. Dans la foulée, les banques avaient reçu l’ordre de contrôler strictement tous les mouvements des comptes et des cartes bancaires de l’Exécutif catalan. Fin septembre, un doute avait plané sur le versement du salaire des 170 000 fonctionnaires du gouvernement catalan, car la Generalitat refusait de fournir à Madrid le registre complet de ces employés, avec leurs jours d’arrêt maladie, coordonnées bancaires, etc.
R. I.