Sinistre présage
Par Sadek Sahraoui – Pour la prestigieuse revue britannique The Economist, l’Algérie ferait donc partie des trois ou quatre pays arabes où la société affiche une sympathie grandissante pour la charia et où l’islamisme connaît un «rebond» comparé à d’autres pays de la région, qui ont enclenché un processus de sécularisation «à pas forcé».
De manière toute sibylline, cet hebdomadaire qui, à aucun moment, ne dit sur quelle base (ou sur quelles études) il s’est appuyé pour avancer sa toute légère assertion, suggère ni plus ni moins de s’attendre à moyen ou à long termes à une seconde tentative de prise du pouvoir par les islamistes en Algérie. Le message codé de The Economist n’est pas sans rappeler la sinistre prédiction faite par le département d’Etat américain dans les années 1990, qui misait sur une victoire du FIS et un effondrement rapide de l’Etat algérien face aux coups de bélier des islamistes. Les gens qui se rappellent de la séquence gardent certainement en mémoire la manière avec laquelle les Algériens ont démenti la «prophétie» américaine et démontré que tout ce qui avait pu s’écrire à l’époque sur la crise était bidon.
Comme durant les années 1990, nous sommes encore aujourd’hui très tentés de dire que l’article de The Economist n’est qu’une aberration de plus. Une affabulation probablement commandée par le Maroc et ou un autre ennemi de notre pays. Les ennemis, ce n’est pas ce qui manque. Il est à parier même que son auteur n’a jamais mis les pieds au Maghreb. Si cela avait été vraiment le cas, il n’aurait jamais écrit des idioties du style «le processus de sécularisation est plus avancé en Arabie Saoudite qu’en Algérie». Il n’y a pas plus stupide d’ailleurs que de comparer l’Algérie à l’Arabie Saoudite.
Ceux qui connaissent bien l’Algérie savent que les islamistes n’ont jamais été autant en difficulté que ces dernières années. La preuve, leurs partis qui, par le passé, avaient le vent en poupe, éprouvent aujourd’hui toutes les difficultés du monde à mobiliser. La difficulté est telle qu’ils ont été contraints et forcés même d’apporter une touche moderne à leurs discours pour «rester dans le coup», comme on dit. Tout le monde a fini en effet par comprendre que la société algérienne avait changé. Il ne reste visiblement que The Economist qui n’a rien saisi à l’histoire.
S. S.
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