L’entretien du ministre israélien Katz censuré : que cachent les Saoudiens ?
Par R. Mahmoudi – Dans son interview au site saoudien Elaph (lire notre article par ailleurs), le ministre israélien du Renseignement, Ysrael Katz, a affirmé mercredi que le gouvernement israélien invitait le prince héritier d’Arabie Saoudite, Mohammad Ben Salman, à visiter Israël, bien que les deux pays n’aient pas de relations diplomatiques. Ce passage de l’entretien a été censuré par le site et révélé par la presse israélienne.
Le quotidien Yediot Aharonot a aussi dévoilé le contenu d’autres extraits retirés par la censure saoudienne. Il s’agit notamment d’un souhait formulé par le ministre israélien de voir le régime saoudien adresser une invitation à Benyamin Netanyahou de se rendre à Riyad, «en vue de renforcer le processus de paix», a-t-il expliqué.
Les ciseaux de la censure ont aussi retiré une réponse, pourtant élogieuse, du ministre dans laquelle il a dit que l’Arabie Saoudite «mérite de conduire le processus de paix, pace qu’aucun autre pays arabe ne jouit d’une telle capacité de compréhension». Un autre passage dans lequel le responsable israélien louait «l’ouverture» de la monarchie wahhabite et ses «réformes» a encore été jugé inopportun par la censure qui a aussi préféré effacer une phrase qui ne choque pourtant plus personne : «L’Iran est l’ennemi commun entre l’Arabie Saoudite et Israël.»
La presse israélienne a aussi révélé que le journaliste qui a réalisé l’interview avec le ministre des Renseignements israélien était lui-même israélien, qui a déjà travaillé pour la chaîne américaine d’expression arabe Al-Horra, avant d’être recruté comme correspondant du site Elpah.
Dirigé par un ancien directeur de rédaction d’Al-Charq Al-Awsat, propriété d’un des fils du roi Salman, le journal électronique Elpah a déjà interviewé, il y a un mois, une haute personnalité militaire israélienne. Une première dans les annales de la presse saoudienne, qui montre la voie à d’autres initiatives encore plus audacieuses dans le sens d’une normalisation de plus en plus décomplexée avec l’entité sioniste, au moment où se joue le sort de la cause palestinienne après l’annonce de Donald Trump de déplacer le siège de l’ambassade des Etats-Unis vers El-Qods.
Cette orientation médiatique coïncide avec des changements décidés par le prince héritier à la tête de plusieurs médias lourds appartenant à la famille régnante. Le dernier en date concerne le groupe MBC, principal vecteur médiatique du régime saoudien dans le monde, dont le siège central est à Dubaï. Ainsi, la direction de ce groupe passera en janvier prochain entre les mains de Badar Ben Farhan, membre de la famille régnante et proche de Mohammed Ben Salman.
Dans le même sillage, le quotidien à grand tirage Al-Hayat vient de rompre son contrat avec le célèbre chroniquer Jamal Khashoggi pour «dépassements». Khashoggi s’est rendu ces derniers mois célèbre par ses prises de position franches et courageuses contre la normalisation avec Israël et aussi contre le style de gouvernance du prince héritier.
R. M.
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