Les présidents ouest-africains reportent leur décision à 2018 : le Maroc indésirable à la Cédéao
Par Sadek Sahraoui – La Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) tient son 52e sommet aujourd’hui à Abuja, au Nigeria. Contrairement à ce qu’espérait Mohammed VI, la demande d’adhésion du Maroc n’est pas à l’ordre du jour de l’organisation ouest-africaine. Les leaders ouest-africains ont décidé, en effet, de se donner encore un peu de temps avant de se prononcer sur le dossier.
Selon des échos en provenance de la capitale du Nigeria, l’opinion n’est majoritairement pas favorable au Maroc. Même si officiellement, aucun Etat ne s’y oppose, l’adhésion du Maroc suscite néanmoins, dans les coulisses, des résistances. Abuja est la première capitale à ne pas vouloir des Marocains en Afrique de l’Ouest. Considéré actuellement comme la première économie d’Afrique, le Nigeria craint de se voir affaiblir par l’arrivée du Maroc.
En vérité, tout le monde en Afrique de l’Ouest redoute l’arrivée sur les marchés de produits marocains plus diversifiés, parfois de meilleure qualité et à moindre coût.
Des acteurs du secteur privé sénégalais, réunis au sein du Comité d’initiative pour le suivi de l’intégration, ont d’ailleurs tiré récemment la sonnette d’alarme. Pour eux, l’adhésion du Maroc à la Cédéao provoquera à coup sûr la mort de plusieurs secteurs d’activité car l’économie marocaine plus compétitive. «Le Maroc, avec la compétitivité de ses marchandises qui n’est pas comparable à celle des pays de la Cédéao, viendra inonder le marché sénégalais avec ses produits et aucun secteur ne sera épargné. Nous n’avons pas les moyens de faire face aux entreprises marocaines», a déclaré Mor Talla Kane, directeur exécutif de la Confédération des employeurs du Sénégal (Cnes). Mor Talla Kane reconnaît également que face à la toute-puissance des secteurs marocains de l’industrie, de l’agroalimentaire et de l’immobilier, «tous nos secteurs seront perdants car nous n’avons pas d’offre à faire pour le marché marocain». Pour lui, «il n’est pas question d’accepter pour le Maroc ce qu’on a refusé pour l’Union européenne (libéralisation du marché, ndlr)».
Au lieu d’une entrée du Maroc à la Cédéao, certains pays militent plutôt aujourd’hui en faveur de la mise en place d’un partenariat stratégique. Justement, les chefs d’Etat de la Cédéao ont été invités, ce matin, à prendre connaissance des résultats de l’étude d’impact de l’adhésion du Maroc à leur ensemble. Il est certain que beaucoup d’entre eux ne verront plus Mohammed VI de la même manière. Dans tous les cas, le dossier du Maroc ne sera sur la table de la Cédéao qu’en 2018. Et encore !
S. S.
Comment (22)