Le lancement d’une chaîne de télévision russe en France sème la panique
Par R. Mahmoudi – Le lancement officiel, lundi, de la chaîne russe d’info en continu RT dans sa version française a été vécu, en France, comme un acte d’invasion mais, surtout, indirectement, comme une entrée en scène d’un concurrent qui risque de mettre à mal les médias locaux et occidentaux qui avaient jusque-là le monopole sur la fabrication de l’opinion, et de rafler ainsi des parts de marché. Le succès des versions espagnole, anglaise et arabe de cette chaîne inquiète au plus haut point.
L’agence AFP a été le premier média à rappeler les lourdes appréhensions qui avaient accompagné la mise en œuvre de ce projet, et exprimé ouvertement par le président, Emmanuel Macron, lequel avait accusé deux médias russes, RT et l’agence Sputnik, d’avoir essayé d’influencer le cours de l’élection présidentielle en France, en les qualifiant d’«organes d’influence et de propagande mensongère». Macron s’alignait sur la position de Washington qui considère RT comme un organe de «propagande pro-Kremlin».
Il est clair que les Français ne veulent pas d’un média qui répercute la ligne politique connue de Moscou sur les grandes questions internationales, à commencer par celles inhérentes aux conflits du Moyen-Orient. Alors, ils espérèrent que les responsables de cette chaîne pourront se donner le temps de «prouver au monde francophone son indépendance». A défait de quoi, l’épée de Damoclès, la censure officielle du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), sera appliquée au moindre «faux pas». Comme en Grande-Bretagne, où l’instance de régulation de l’audiovisuel (Ofcom) a déjà émis 14 mises en demeure contre RT et l’a menacée de sanction, pour des sujets notamment sur la Syrie et l’Ukraine. Aux Etats-Unis, les autorités ont forcé la chaîne à s’enregistrer comme «agent de l’étranger». La Russie a aussitôt riposté en enregistrant en tant qu’«agents de l’étranger» des radios financées par le Congrès américain.
Le CSA a déjà fait savoir, par la voix de son président, qu’il observerait «constamment» les programmes de RT et agirait avec «promptitude» en cas d’«anomalies», mais sans préciser lesquelles et dans quelles proportions. Car toute la question est là : quelles sont les limites de la liberté d’expression en France ?
R. M.
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