Accolade entre Messahel et Bourita : dégel de façade ou retour à la raison ?
Par R. Mahmoudi – Miracle de la diplomatie : au moment où tous les observateurs s’attendaient à un nouvel accès de tension dans les relations algéro-marocaines, suite aux propos tenus, il y a seulement deux jours, par le Premier ministre Ahmed Ouyahia, rappelant la responsabilité de nos voisins de l’Ouest dans les flux de cannabis et de cocaïne qui arrivent en Algérie, c’est tout à fait le contraire qui s’est passé, hier, à l’ouverture de la 14e conférence des ministres des Affaires étrangères du Dialogue 5+5, à Alger. Le chef de la diplomatie marocaine, Nasser Bourita, a non seulement démenti les rumeurs, relayées par certains organes de presse algériens qui, la veille, avaient écrit que le Maroc aurait décidé de réduire sa participation à ladite conférence et qu’elle serait représenté par un cadre du ministère, mais, il a surtout surpris tout le monde en acceptant de marcher avec son homologue algérien, main dans la main.
Bien que confinées dans un cadre purement protocolaire, ces retrouvailles chaleureuses entre les responsables des deux pays ont déjà l’avantage d’avoir eu lieu. Mieux, elles peuvent amorcer rapidement un processus de normalisation des relations et ouvrent la voie à d’autres rencontres et d’autres initiatives communes. C’est ainsi que des sources diplomatiques n’excluent pas une prochaine visite d’Abdelkader Messahel à Rabat, pour des discussions plus approfondies sur tous les aspects inhérents aux relations algéro-marocaines.
Salué par la presse marocaine, le geste fraternel et inédit dont Messahel et Bourita ont été les acteurs, est interprété comme un signe de dégel, mais surtout comme une volonté réelle et partagée de mettre fin à des hostilités cycliquement nourries par des gestes de provocation entamée, faut-il le rappeler, par le Makhzen marocain et ses relais politico-médiatiques et qui ont atteint leur point culminant le 1erNovembre 2013, lorsqu’un activiste marocain arracha le drapeau algérien sur le fronton du consulat d’Algérie à Casablanca, sous le regard complice des forces de l’ordre.
De tels incidents auraient pu être contenus si le roi Mohammed VI avait accepté de calmer le jeu. Or, dans tous ses discours à «son» peuple, il ne manque jamais de s’en prendre, directement ou indirectement, à l’Algérie, en l’accusant d’être à l’origine de l’instabilité dans la région. Fort du soutien de Paris et de Washington, la monarchie alaouite a opté pour un durcissement de sa politique d’annexion du Sahara Occidental, faisant fi de toutes les résolutions onusiennes, et en posant son projet d’autonomie des «territoires du Sud» comme unique solution envisageable à la question sahraouie.
Mais la multiplication des revers diplomatiques, dont le dernier en date est l’annulation par le Cour de justice de l’Union européenne de l’accord de pêche Maroc-UE, dévoile brusquement la fragilité de la monarchie et de ses soutiens extérieurs, et l’obligeront certainement à revenir à la raison. Cette accolade à Alger en est-elle le premier signe ?
R. M.
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