Entretien avec Slimane Zenati, coordinateur du Cnapeste Béjaïa : «La tutelle porte l’entière responsabilité de la situation»
Algeriepatriotique : Le mouvement de grève que vous avez lancé semble arriver à la croisée des chemins. Quel est votre plan de riposte face aux menaces de radiation brandies par le ministère de tutelle contre les grévistes ?
Slimane Zenati : Le mouvement que nous avons lancé n’est pas à la croisée des chemins, il est dans le même chemin qu’il s’est tracé dès le début. Il a plutôt gagné en maturité et en résistance. Le ministère de l’Education qui s’est empressé d’user de mesures coercitives, de pressions judiciaires, dès le départ, au lieu d’ouvrir les portes du dialogue, porte l’entière responsabilité de la situation actuelle. Au lieu de s’échiner à humilier les enseignants et à brandir les menaces de radiation, les responsables doivent plutôt donner des réponses aux revendications posées.
Le Premier ministre a emboîté le pas à Mme Benghebrit, en menaçant d’user de la force de la loi et en disant ne pas comprendre ce que signifie «une grève ouverte». Quelle est votre réaction ?
Le Premier ministre est sollicité pour user de ses prérogatives pour dénouer le statu quo en œuvrant à ouvrir les portes du dialogue. J’insiste sur le fait que les menaces n’ont jamais été un moyen de règlement des conflits sociaux. Concernant «la grève ouverte» dont le Premier ministre dit ignorer la signification, il existe dans le jargon syndical algérien et universel divers types de grèves : grève générale, grève perlée, grève tournante, grève surprise, grève momentanée, grève illimité, grève ouverte. Je l’avoue que ce n’est pas de gaîté de cœur que nous avons opté pour ce type de grève mais lorsque les problèmes s’accumulent, que les responsables s’adonnent au sport de promesses sans lendemain et que des procès-verbaux, pourtant paraphés par le sceau de la République algérienne ne sont pas respectés, il ne reste aux enseignants pour faire entendre leur voix que cette voie.
Votre rencontre avec la ministre, le 5 février dernier, avait suscité de l’espoir quant aux possibilités de trouver enfin un compromis. Mais les choses se sont corsées depuis. Que s’est-il passé ?
D’abord, il faut préciser que notre grève s’inscrit dans une dynamique nationale. Les revendications soulevées par cette grève sont de caractère national. S’il est vrai que le cas des wilayas de Béjaïa et Blida s’avèrent prioritaires, il n’en demeure pas moins que la principale revendication de ce mouvement est la mise en œuvre des accords cosignés entre le ministère de l’Education et le Cnapeste en date du 19 mars 2015. Par ailleurs, le préalable posé par madame la ministre, consistant en l’arrêt de la grève pour l’ouverture du dialogue, n’est pas conforme à la réglementation en matière de prévention et de règlement des conflits, tel que précisé dans la loi 90/02. Toutefois, nous saluons les efforts de madame la ministre pour l’organisation de cette rencontre qui aurait pu être le début d’un processus devant déboucher sur un dialogue et une négociation avec le bureau national autour des revendications en instance.
Le Cnapeste a adressé une lettre au chef de l’Etat pour lui faire part de vos préoccupations. Qu’est-ce que vous lui avez demandé ?
Lorsque le ministère de l’Education nous ferme les portes du dialogue et répond par des moyens répressifs à des revendications justes et légitimes, il est évident de saisir les instances suprêmes du pays. Nous avons saisi le président de la République, justement, pour lui dire l’injustice dont sont victimes les enseignants qui sont pourtant la pierre angulaire de l’édifice national. Nous souhaitons que des mesures urgentes soient prises dans le sens d’un règlement du conflit qui n’a que trop duré.
Entretien réalisé par R. Mahmoudi
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