Le pacha à Alger
Par M. Aït Amara – Tout un symbole. C’est pour inaugurer la mosquée Ketchaoua restaurée par les Turcs que l’homme fort d’Ankara se rend à Alger. Bien sûr il sera question, lors du séjour d’Erdogan, de géopolitique et de business aussi. Mais le point nodal de ce déplacement est autrement plus profond. Il sous-tend une politique expansionniste déguisée du régime dictatorial conduit par l’AKP qui œuvre, depuis l’avènement des islamistes au pouvoir en Turquie, à ressusciter l’empire de la Sublime Porte en s’incrustant subrepticement dans les pays où cette nation coloniale compte des inféodés.
Il en est ainsi de l’Algérie où des partis et des députés affidés au régime d’Ankara militent pour la recolonisation du pays par cette ancienne puissance – dont il n’a jamais été dit qu’elle a occupé l’Algérie au même titre que la France et qu’elle y a agi en tant que force occupante, reléguant les populations autochtones au rang de serviteurs et de sujets.
La déformation de l’histoire écrite et enseignée dans nos écoles depuis l’Indépendance s’explique par la crainte que cette terrible vérité soit interprétée comme une attaque contre l’islam. Une confusion sciemment et savamment entretenue par les milieux baathistes et islamistes qui ont fait de la guerre postindépendance contre la culture et la langue françaises une priorité absolue, au point de substituer une domination à une autre. Plus d’un demi-siècle après l’indépendance de l’Algérie, les gouailles du gourou Erdogan – partis politiques, députés et médias – nostalgiques de la colonisation turque, jubilent à l’idée que leur maître vienne enfin à leur rencontre et marque de son empreinte un lieu de culte hautement symbolique représentant une époque, la Régence d’Alger, que Hassan Aribi, le MSP d’Abderrazak Mokri et des médias à la solde des Frères musulmans s’échinent à rétablir.
Ennemis de la France coloniale et postcoloniale, ces fidèles tournés vers la Mosquée bleue se prosternent aux pieds du sultan dont ils escomptent qu’il les ramène aux siècles des pachas, des aghas et des deys.
M. A.-A.
Comment (22)