Nouvel ordre ?
Par Mrizek Sahraoui – De la bombe atomique, l’on est passé à la bombe diplomatique lâchée par les deux chefs d’Etat les plus imprévisibles et, à la base, irréconciliables de la planète, résume un analyste patenté de la politique américaine, peu après la décision de Donald Trump d’accepter la main tendue par son homologue nord-coréen, Kim Jong-un, qui a émis le souhait d’une rencontre au sommet… entre les deux dirigeants, les meilleurs ennemis du monde, rendue possible grâce aux récents contacts entre la Corée du Nord et le voisin du Sud.
La lecture qu’on peut faire de cet événement aussi inattendu qu’il a stupéfié le monde entier est que, en matière de diplomatie, rien n’est figé. Pour peu que la réalité prenne le pas sur le désir, on finit toujours par trouver un terrain d’entente, d’autant plus vrai entre les maîtres du monde, le club fermé des détenteurs de l’arme nucléaire dont fait partie le leader nord-coréen.
Si la Corée du Nord est à Donald Trump ce que fut Cuba à Barack Obama, c’est-à-dire synonyme d’une rupture avec le passé, marqué par plusieurs années de rigidité diplomatique, passées à se regarder en chiens de faïence, avec leur lot de méfiance, d’incertitude et le danger qu’encourt l’humanité à chaque épisode de tension dans les relations internationales, alors l’on est en droit d’espérer qu’un vent de paix souffle sur l’humanité qui a un peu douté, après l’élection de Donald Trump et au regard de ses revirements, son égo surdimensionné, tant elle paraissait suspendue à ses humeurs et à celles des autres aussi, dans un contexte international au bord de la troisième guerre mondiale.
D’ici le printemps, la date de la rencontre entre Donald Trump, l’un des plus vieux présidents en exercice, et Kim Jong-un, l’un des plus jeunes, aura été fixée. Qu’attendre d’une telle rencontre ? Beaucoup et rien à la fois. Beaucoup parce que c’est la première initiative du genre, bien que, par le passé, l’ancien président Jimmy Carter, en juin 1994, et la secrétaire d’État Madeleine Albright, en octobre 2000, eussent tenté un rapprochement avec Pyongyang. Beaucoup aussi au regard de la baisse soudaine de la tension, conséquence directe du dégel en cours, dans les relations entre les deux pays, toujours en ébullition, tantôt au plus haut, tantôt au plus bas, jamais au beau fixe.
Rien du tout, car les Américains et les Nord-Coréens ont, depuis toujours, joué avec les nerfs de la communauté internationale ; la personnalité atypique des deux présidents – qui sont un oxymore : de doux faucons –, dont l’un est passé maître dans l’art de faire des sorties théâtrales, de revenir sur ses promesses et de faire le contraire de ce qu’il dit ; et l’autre de monter les enchères, de brandir la menace nucléaire et de narguer les autres, peut réserver des surprises, le naturel revient toujours au galop.
De toute évidence, et quels qu’en seront les résultats, il y aura un avant et un après de ce sommet, un nouvel ordre qui se dessine, décidé, comme toujours, par les plus fortes d’entre les nations ayant une longueur d’avance qui, à y regarder de très près, n’ont pas d’amis mais des intérêts.
Les autres suivent… et applaudissent. Comme toujours.
M. S.
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