Problème des banlieues françaises : le grand échec de Macron
Par Mrizek Sahraoui – Les banlieues, le parent pauvre de la politique gouvernementale, probable talon d’Achille d’Emmanuel Macron, un sujet sensible qui devait, selon ses promesses tenues il y a moins d’une année, constituer la priorité des priorités, semblent pour l’heure passer à la trappe.
Bien que la question des quartiers précisément ait été évoquée, ait fait l’objet de surenchère, jusqu’à diviser les courants supposés favorables à la relance d’une politique favorisant ces zones délaissées, l’engagement à agir vite et de faire de ces «territoires perdus de la république» – rengaine habituelle du Front national – l’incarnation du rêve français, fac-similé de l’américain, avec, toutefois, moins d’authenticité, paraît renvoyé aux calendes grecques. Une façon de faire similaire à quasiment toutes celles des Présidents de la Ve République, plus marquées, toutefois, par un flagrant clivage lors des mandats des Présidents issus des rangs de la droite, ceux de gauche étant plus portés au discours qu’aux actes, ce qui revient au même.
Après presque une année à la tête de l’Etat, Emmanuel Macron, vu sur ce sujet-là comme l’homme providentiel qui allait apporter la solution définitive aux problèmes des banlieues, n’a pas du tout ou peu évoqué les banlieues, là où il était allé jouer au foot avec les jeunes, alors candidat. Il ne s’est pas du tout préoccupé de (ses) «no go zones», où se cristallisent les haines entre communautés, le chômage dépasse de loin la moyenne nationale, d’où les trafics en tout genre, se manifeste le rejet de l’autre, où se joue la guerre d’occupation des territoires entre une jeunesse se sentant indexée et les forces de l’ordre, enclines, depuis au moins le mandat de Nicolas Sarkozy, à appliquer la loi du talion, mieux, à répliquer par le légendaire «je t’aime moi non plus», s’arrogeant le droit, à maintes reprises, au contrôle au faciès, parfois musclé, en dépit de la loi, souvent laxiste à l’encontre des policiers abusifs. Ce qui, évidemment, nourrit le ressentiment.
Chacun sait que dans les banlieues sévissent tous les vices, accusent les médias mainstream de couleur bleu-blanc-rouge vif. C’est aussi un endroit d’où peuvent naître des stars et où l’intelligence peut l’emporter sur le désespoir – un constat jamais partagé par cette même presse –, pour peu que la bonne volonté des pouvoirs publics se traduise, non pas par une exacerbation des tensions, mais par une prise en charge des populations résidentes de ces quartiers, souvent perçues comme des «sous-citoyens» quelles qu’aient été leur origine et leurs situations familiale et professionnelle.
La politique des banlieues, ce sont des décennies de discours sans cesse renouvelés et de renoncements, souvent dictés par la seule motivation inhérente aux objectifs purement électoralistes, loin d’une prise en charge sincère d’une population qui ne demande qu’à être vue, perçue, estimée membre à part entière de la communauté nationale.
Faisant l’objet de surenchère à chaque élection, qu’elle soit présidentielle, nationale ou locale, les banlieues ont depuis toujours suscité un débat passionné, animé entre ceux qui imputent à celles-ci les maux de la société française, l’insécurité et les clivages en relation avec l’histoire, la religion, la race pour les plus extrémistes, et même la détérioration de la notion du vivre ensemble, et le reste, peu nombreux, qui considère(nt) que les banlieues méritent plus d’égards, doivent être prises en charge au même titre que les quartiers riches, conditions sine quibus non pour que, estiment les plus tolérants, le climat s’apaise, les relations, avec les policiers notamment, redeviennent à peu près normales.
Osons espérer que le président actuel, après avoir fait le tour des dossiers dont il s’était dit capable d’apporter les solutions par «le changement des visages et des usages», rhétorique en vogue chez les macronistes de première heure, daigne s’occuper des banlieues, lieux où rien n’est tout blanc ou tout noir.
M. S.
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