Bernard-Henri Lévy pouvait-il ignorer le financement libyen de Sarkozy ?
De Paris, Mrizek Sahraoui – «Tu m’étonnes !», aurait-on dit à un intime. Avec un tel bilan de la révolution dite «du 17 Février» – un chef d’Etat assassiné, un peuple toujours en proie à la guerre civile, un pays dépecé, divisé en territoires ennemis dont les richesses profitent au monde entier, surtout aux criminels, sauf au peuple libyen, une région devenue capitale mondiale des trafics en tous genres, de surcroît, fief des réseaux terroristes –, Bernard-Henri Lévy a (ré)affirmé, ce vendredi, au micro d’Europe 1, que la guerre en Libye «était juste».
Sur cette funeste intervention en Libye, le philosophe de pacotille, lors de cette sale guerre, en cheville avec Nicolas Sarkozy qui a dû tirer les marrons du feu avec l’avantage, d’une part, d’en avoir fini avec Kadhafi qu’il fallait faire taire pour les raisons que les juges français semblent connaître, et, d’autre part, l’espoir, en instrumentalisant alors la chute du guide, de relever, une année plus tard, en 2012, le défi de se succéder à lui-même, «n’a pas de doutes sur les motivations de Nicolas Sarkozy».
Postulons que nous sommes volontiers d’accord avec cette déclaration ! Pouvait-il, en effet, ne pas être au courant, lui le chef d’orchestre de la musique macabre qui se jouait avant, pendant et après la supercherie du «printemps libyen» ? Il le dit clairement sur les ondes d’Europe 1 : «Je ne suis pas le plus mauvais témoin de ces semaines-là et de ces mois-là». Rien que pour cette affirmation, le juge Serge Tournaire devrait l’entendre, au moins comme témoin dans l’affaire du financement illicite de la campagne de Nicolas Sarkozy en 2007, par l’argent libyen. Sans doute a-t-il des choses à dire à ce sujet.
Comme si les crimes contre le peuple libyen, commis au nom d’une prétendue intervention militaire humanitaire, n’eurent pas existé, les atrocités perpétrées par l’Otan contre la population civile furent une simple fable, la démocratie, cette chimère tant promise d’un côté et tant attendue de l’autre, prospéra, en un mot, comme non rassasié de tout le sang versé depuis, Bernard-Henri Lévy, pour parer au terrorisme qui frappe la France, suggère de réserver le même traitement à la Syrie. Le va-t-en-guerre est en décalage et, visiblement, en retard d’une guerre. La politique et les relations internationales ayant changé depuis, cela a dû lui échapper.
Alors même que le monde entier est unanime sur les conséquences dramatiques de la guerre en Libye, sur laquelle porte une lourde responsabilité et devra, peu importe quand et où, répondre Bernard-Henri Lévy, il existe encore des voix, celle de Henri Guaino en l’occurrence, ancien conseiller de Nicolas Sarkozy, qui soutiennent qu’entre l’état actuel de la Libye et voir survivre Kadhafi, le choix est simple et vite fait. Le sort de la Libye et de celui du peuple Libyen, manifestement, importent peu. Mais, osons cette comparaison scabreuse, lorsqu’il s’était agi, notamment, de l’affaire Daniel Pearl, du nom du journaliste américain pris en otage puis assassiné au Pakistan, en 2002. Bernard-Henri Lévy avait, rappelons-le, remué ciel, terre et mer pour connaître la vérité, trouver les assassins, déterminé alors à élucider le mystère de sa mort, quel qu’en ait été le prix. La suite est connue : les assassins du journaliste du Wall Street Journal sont retrouvés, poursuivis et condamnés à mort.
Cela dépasse le cadre des deux poids et deux mesures.
M. S.
Comment (14)