L’UE cherche-t-elle à placer les islamistes au pouvoir dans le Maghreb ?
Par R. Mahmoudi – Le chef du parti islamiste tunisien Ennahdha, Rached Ghannouchi, a été reçu jeudi en homme d’Etat à Bruxelles par Federica Mogherini, haute représentante européenne aux Affaires étrangères et des Politiques de sécurité, afin de «discuter de la situation en Tunisie, des réformes sociales, économiques, et de la gouvernance actuelle dans le pays».
Un porte-parole de la Commission européenne a expliqué cette rencontre par la «l’importance des relations tuniso-européennes» et la volonté de soutenir davantage «l’expérience démocratique tunisienne», mais ne dit pas à quel titre le président du mouvement islamiste a été reçu, sachant que celui-ci n’occupe aucune fonction officielle dans l’Exécutif de son pays et son parti ne constitue pas la majorité parlementaire. Du côté tunisien, on ne sait pas si cette visite a eu l’aval préalable du gouvernement ou du président tunisien. Mais, dans tous les cas de figure, M. Ghannouchi a bien représenté son pays, puisque les discussions avec les responsables de la Commission européenne ont porté sur la coopération entre les deux parties et, plus globalement, sur l’avenir de la Tunisie.
Intervenant à quelques semaines des premières élections locales depuis la chute de l’ex-président Zine El-Abidine Ben Ali, cette rencontre ne peut être perçue que comme une façon d’influer sur le cours de cette élection, et un choix tacite pour un retour des islamistes aux commandes en Tunisie.
Réputée proche de Doha, le mouvement Ennahdha tente, en effet, de se replacer sur l’échiquier politique local, à la faveur des pressions qui s’exercent depuis quelque temps sur le pouvoir tunisien qui, lui, s’efforce à observer une certaine neutralité dans le conflit entre l’Arabie Saoudite et le Qatar. Ces deux pays reprochent également à Tunis ses démarches pour rétablir ses relations avec Damas. De ce point de vue, il est établi qu’une Tunisie islamiste paraîtrait plus acquise à la politique internationale de l’Union européenne.
Après cet antécédent, on est en droit de s’interroger si l’Union européenne n’aurait pas prévu dans son agenda d’inviter les islamistes algériens de même obédience.
R. M.
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