Retour à la loi du talion
Par Saadeddine Kouidri – Trump croit qu’il est l’homme le plus fort puisqu’il est à la tête de la première puissance du monde, et à ce titre, il devait rabattre le caquet à Poutine qui ne cesse de le narguer par cette victoire indéniable de la Syrie sur Daech et ses alliés, par ce tweet provocateur qui dit : «Tiens-toi prête Russie parce qu’ils arrivent beaux, nouveaux et intelligents.» Ces généraux et conseillers lui ont fait comprendre que son tweet est une provocation à une guerre nucléaire, où il risque d’être parmi les perdants.
Etant hôtelier de profession, marchand de sommeil de luxe pour ainsi dire, il comprit vite où est son intérêt, mais ne pouvait ignorer qu’il est tout de même l’homme le plus puissant de la planète, et qu’à ce titre, confondant puissance et supériorité, cette dernière héritée de sa classe d’aventuriers, d’évangélistes-pasteurs des pères fondateurs étasuniens qui perpétuèrent le racisme au nom duquel ils abreuvèrent la terre du sang du peuple indien, il doit marquer sa qualité de champion, et à ce titre, il envoya ses missiles comme chien qui pisse pour délimiter son territoire, comme il sied à un héritier du Ku Klux Klan.
Quant aux missiles de Macron, ils n’ont pas été tirés, rapporte Sputnik. Une rumeur, un fake news comme on dit ou une vérité vraie ? Qui sait ? Ne fallait-il pas doter les bombes de caméras pour éviter une telle rumeur ? A se demander pour quelle raison cela n’a pas été fait. Est-ce parce l’image en direct ne permet pas certains mensonges ? Macron, l’enfant de la finance, considère que lancer des missiles sur un pays exsangue par la guerre qui dure depuis sept longues années sert «à sauver l’honneur de l’Europe» !
Alors que sans mandat de l’ONU, sans l’approbation du Sénat, sans preuve et au moment même où les enquêteurs de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) prenaient le chemin de Damas pour enquêter sur l’attaque attribuée arbitrairement au président syrien, le leader du capitalisme mondial et deux de ses acolytes, membres du Conseil de sécurité de l’ONU, bombardent ces mêmes usines de Douma, sujets de l’enquête dans la nuit du 13 au14 avril 2018 avec plus de cent missiles.
Bombarder des usines où les enquêteurs doivent se rendre ne serait-il pas une tentative de saboter l’enquête, sachant d’après ce que rapporte TSA dans son article intitulé : «Syrie : les Etats-Unis justifient leurs frappes auprès de l’opinion algérienne» de ce mardi 17 avril 2018 que «le porte-parole du Département d’Etat américain pour la région du Moyen-Orient n’a toutefois pas été en mesure de fournir durant la téléconférence des preuves définitives prouvant au-delà de tout doute que le régime de Bachar Al-Assad a bien été responsable de l’attaque chimique du 7 avril à Douma».
Si ce n’est pas le pouvoir syrien le responsable de cette attaque chimique, alors c’est qui ? Pour Sputnik, comme pour les missiles de Macron, il n’y a pas eu d’attaque chimique. Cette dernière infirmation est illustrée par des images à l’appui sur Youtube. Pour insister, on se pose la question : à qui profite le crime ? Tous les crimes, y compris ceux de Daech, commis à proximité d’Israël depuis soixante-dix ans profitent à ce pays et à son Etat sioniste. Pourquoi cette dernière agression ne lui serait-elle pas attribuée ?
Là nous sommes loin des fake news, et l’absence de la moindre rumeur du moindre soupçon paradoxalement cache mal la vérité vraie. Cette dernière est marquée par l’absence de décision légale du Conseil de sécurité et l’absence de décision légitime de Macron, par exemple, à neutraliser les snipers israéliens qui tuent et blessent des centaines de paisibles manifestants.
Les capitalistes semblent reprendre des mesures qui rappellent celles qu’ils appliquaient aux esclaves, aux indigènes, et pour cela, il leur a suffi d’évoquer leur légitimité à la place de la légalité internationale. La même loi appliquée pour tous n’existe pas à leurs yeux. On n’est pas loin de cette prétendue supériorité de ceux qui appartiennent à un peuple élu. Cette supériorité ou cette élection mène au pire : tuer, torturer, massacrer, bombarder, égorger, empoisonner, sans remord, convaincu que la victime n’est pas un élu de Dieu et donc un être insensible. Terroriser les peuples redevient, comme à l’accoutumée, synonyme de les civiliser.
Les luttes de libération nationales étaient sur le point de vaincre la loi du talion. En réalité, cette loi du plus fort n’était que remise au placard, car les féodalités aux aguets se sont vite ressaisies grâce à leurs anciens maîtres, pour revenir sur la scène politique sous les oripeaux de l’islam.
En l’absence du bloc soviétique, le Mouvement de libération nationale ne pouvait accompagner la Palestine comme il a accompagné l’Algérie à la victoire. La «Marche du retour» des Palestiniens nous rappelle notre manifestation de Décembre 1960 et aura certainement un même résultat grâce à la solidarité internationale ou internet arrivera certainement à suppléer le poids du MLN de ses fameux leaders et leur Bandoeng.
Quand ils invoquaient cette possibilité que des missiles Scud équipés de têtes chimiques soient un jour tirés contre des cibles étrangères – comprendre Israël – Obama avait décrété à lui seul la ligne rouge à ne pas franchir, sachant que la Syrie venait de reconnaître le traité en 2013. Il s’était abstenu d’exécuter sa menace, alors que la Syrie était accusée d’une attaque chimique parce que «ses services secrets n’étaient pas sûrs à 100% de l’origine de l’attaque». Aujourd’hui, Trump, avant l’enquête décidée par les instances internationales, reprend à son compte cette ligne rouge pour légitimer le droit d’agresser, allant à l’encontre des résolutions de l’ONU et du veto russe.
Les trois puissances se mettent du coup en impuissance dans leurs guerres contre le terrorisme puisqu’elles sont elles-mêmes dans l’illégalité vis-à-vis des lois internationales.
Pour pallier leur faiblesse de hors-la-loi, ils s’allient à un Arabe, à un Arabe super riche, sachant que l’argent est le nerf de la guerre, pour échapper à la pression de l’opinion. Dans leur club, ils intègrent donc l’Arabie Saoudite dont ils taisent, par honte parfois, le nom dans leurs communiqués en citant la Jordanie à sa place ! Cette erreur est volontaire pour tromper l’opinion, qui sait aujourd’hui que le meilleur financier du terrorisme est l’Arabie Saoudite.
Ces puissants se mettent hors la loi et rejoignent le terrorisme, dont celui de l’Etat d’Israël est aujourd’hui un modèle-type de l’Occident. Ils remettent comme premier caractère de la gauche dans le monde, en ce début de troisième millénaire, la préservation de la nation, parallèlement aux luttes pour la consolidation des acquis sociaux et les luttes pour cette démocratie qui permet le travail dans la dignité, l’accès au logement, à l’enseignement et aux soins gratuits et qui fait la guerre à la pauvreté. Ils prétendent venir aux secours des enfants irakiens, libyens, yéménites, somaliens, maliens en bombardant leurs pays ! S’ils se contentaient juste de les respecter en tant que fuyards ou en tant que visiteurs ! Même ce minimum, ils ne le pourront pas, car c’est leur guerre qui rend vulnérables les émigrés. Il est plus judicieux de dire qu’ils veulent ramener tous les peuples de la région aux conditions de vie des Palestiniens, c’est-à-dire à une prison à ciel ouvert où tout manifestant serait sous la visée de leurs snipers ou à celui des Yéménites, des Libyens, des Syriens qui vivent dans le dénuement, dans un foyer détruit, dans un pays ravagé. La guerre faite au faible était du domaine animal et l’animal lui-même en est revenu. Pourquoi en est-on arrivés là ?
Ils colonisent le cerveau en faisant croire à l’homme que sa conscience est immatérielle. Le philosophe, le sorcier, le rabbin, le curé, l’imam, le chamane, le gourou au service des pouvoirs racontent depuis les temps les plus reculés des histoires à dormir debout dans le but d’infantiliser l’être humain. Leurs histoires servirent à spolier l’homme de sa conscience, comme le fusil du colon servit à déposséder le paysan de sa terre.
Même la science occidentale, qui n’admet toujours pas que toute vie est pourvue de conscience, et ne pas le comprendre pousse cette science qui se réfère aux atomistes aux réductionnistes, à une intervention extérieure à l’Homme, extérieure à la matière, donc mystérieuse, divine ! Cette perméabilité de la science à l’idéologie est considérée comme une aporie pour rendre l’histoire naturelle de la conscience inabordable.
Tout cela est pour dire que le racisme a aussi des germes y compris dans la science moderne actuelle et peut expliquer que les sciences enrobées dans l’idéologie servent les extrémistes et leur racisme crasseux. Moins raciste que ses compères, le président français demandait récemment aux catholiques «de réinvestir la scène politiquement pour réparer un ‘‘lien abîmé’’», sous-entendu leur faire oublier la défaite du clergé catholique face aux révolutionnaires en 1789 et ramener plus de spirituel dans la sphère politique et, pourquoi pas, leur permettre une revanche sur la gauche. La religion est toujours une couverture pour les salles besognes du politique, mais cette couverture amasse de plus en plus de crasse depuis la mort des prophètes. Daech en est l’exemple.
Jeremy Corbyn affirme que «c’est l’Arabie Saoudite qu’il aurait fallu bombarder». Si ce chef du Parti travailliste britannique avait fait encore un petit effort, il aurait dit que l’urgence est Israël et son armée de snipers qu’il aurait fallu neutraliser une fois pour toute.
Le programme syrien d’un arsenal chimique a été développé dans les années 1980 avec le but d’égaler et de dépasser celui d’Israël, qui possède l’arme nucléaire, pour faire la parité stratégique. Les Syriens ne le feront connaître à l’opinion internationale qu’au mois de juillet 2012. En campagne électorale au mois d’août 2012, Obama fixait à la Syrie une «ligne rouge» à ne pas franchir, au sujet de l’utilisation de ces armes non conventionnelles, ajoutant, qui aurait «des conséquences énormes» ; et cela se confirme aujourd’hui.
La presse du mois d’août 2012 rapportait : «Israël et Washington travaillent depuis plusieurs mois à différents scénarios militaires destinés à neutraliser les stocks d’armes chimiques. Mais aucune solution n’est satisfaisante. Des raids aériens buteraient contre la défense antiaérienne syrienne. Ils risqueraient, par ailleurs, de provoquer une dissémination des agents toxiques dans l’atmosphère.» Aujourd’hui, les médias ne parlent plus du danger de la dissémination.
«Les composants du gaz sarin utilisé en Syrie proviennent de Belgique» est le titre d’un article dont je recommande la lecture, dans Algeriepatriotique du 18 avril. L’auteur, Mrizek Sahraoui, le clôt en fournissant une énième preuve qui disculpe la Syrie : «Dans ces révélations, pour le moins compromettantes pour les autorités belges, à aucun moment le régime syrien n’est cité comme partenaire dans ces échanges commerciaux douteux», après avoir précisé que «les destinataires sont des partenaires commerciaux privés avec qui les entreprises mises en cause entretiennent des relations commerciales depuis plus de dix ans». On devine facilement que ces «commerciaux privés» travaillent contre la Syrie, donc pour Israël ou ses acolytes, dont le plus probable serait l’Arabie Saoudite.
S. K.
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