Pari risqué
Par Mrizek Sahraoui – Donald Trump, après les guerres acharnées auxquelles se sont livrés les Bush père et fils, et celles muettes mais tout aussi effroyables de Barack Obama, avec les conséquences qu’on connaît dans les deux cas, veut-il, lui aussi, donner corps à son «chef-d’œuvre» fait de chaos, de massacres et de sang, histoire d’ajouter son nom à la longue liste du panthéon des bouchers de l’humanité ?
C’est visiblement ce qui se profile avec la probable remise en cause par Trump de l’accord de Vienne sur le nucléaire iranien, signé le 14 juillet 205, entre les cinq membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies : les Etats-Unis, la Russie, la Chine, la France et le Royaume-Uni, auxquels se sont adjoints l’Allemagne ainsi que l’Union européenne et, bien-sûr, l’Iran.
L’approche de la date-butoir du 12 mai, échéance qui pourrait faire basculer, pour longtemps encore, la région du Moyen-Orient dans l’inconnu si d’aventure le Président américain venait à confirmer sa décision de déchirer l’accord, met dans une situation inconfortable Emmanuel Macron qui joue l’équilibriste, un coup du côté de la parole donnée, un autre pour complaire outre-Atlantique, et Angela Merkel, reçue froidement à Washington d’où elle est revenue les bras ballants, n’ayant, ni elle ni d’ailleurs le Président français, pourtant reçu en fanfares, réussi à faire changer d’avis leur homologue américain qui semble déterminé à en découdre avec l’Iran, perçu comme la grande menace d’Israël dans la région, après que la Syrie et l’Irak, affaiblis, sont définitivement mis hors jeu.
Le pari est cependant risqué. La Russie et, surtout, l’Iran ont averti sur la nécessité de maintenir en l’état l’accord «en aucune manière négociable», selon Hassan Rohani qui a prévenu qu’il n’accepterait «aucune restriction au-delà de ses engagements».
Le Président iranien défie ainsi Donald Trump, qui a martelé une nouvelle fois, lors de sa brève et glaciale rencontre de vendredi dernier avec la chancelière allemande : «Ils [l’Iran, ndlr] n’obtiendront pas d’armes nucléaires, ça je peux vous le dire», et pousse à ses retranchements Emmanuel Macron qui a fait volte-face, en proposant une nouvelle mouture plus «large», une tentative de ménager la chèvre et le chou. Plutôt plus le chou, puisqu’il «n’acceptera jamais que l’Iran dispose de l’arme nucléaire», avant de rétropédaler et de s’aligner sur la position de Berlin, Londres, l’UE, Pékin, Moscou et les inspecteurs internationaux, lesquels considèrent que Téhéran tient ses engagements.
Dans le même temps, Benyamin Netanyahou veut la guerre contre l’Iran. Il s’est livré dans une longue et théâtrale allocution, avec à l’appui des cartes, des photos et des documents classés secrets – cent mille récoltés par les services secrets israéliens, selon lui –, ce lundi au QG de l’armée israélienne, à un véritable réquisitoire contre l’Iran, estimant que «l’accord est fondé sur des mensonges». Après un tel discours, il est évident que le Premier ministre israélien a choisi l’option de la guerre et veut influer sur la décision de Donald Trump à l’échéance du 12 mai prochain.
La visite du secrétaire d’Etat, Mike Pompeo, dimanche 29 avril, en Israël, est loin d’être anodine. Après avoir neutralisé la Syrie, l’Irak et avec la bénédiction de Mohamed Ben Salmane, la guerre contre l’Iran se prépare.
Les observateurs s’accordent à dire que la Russie ne laissera pas faire.
M. S.
Comment (3)